Lazare Goujon en avait rêvé. Maire de Villeurbanne entre 1924 et 1935 et instigateur du quartier des Gratte-Ciel historiques, il imaginait des « Champs-Élysées prolétariens » qui s’étendraient jusqu’au Rhône, rappelle Agnès Thouvenot, première adjointe du maire actuel, en charge de l’urbanisme. Le nouveau quartier n’ira pas aussi loin, mais le centre-ville doublera quasiment de taille une fois l’ensemble des chantiers livrés.
Abandonné dans les années 1930 faute de financements, le projet a longtemps dormi dans les cartons. Si les premières acquisitions foncières remontent à 1987, il a fallu attendre 2008 pour que la Ville et la Métropole trouvent un accord sur une vision commune, se souvient l’élue.
Après la construction du groupe scolaire Rosa Parks en 2019 et le déménagement du lycée Brossolette en 2021, le vrai démarrage du chantier au cœur du projet n’a eu lieu qu’en septembre 2024. Le premier îlot comprend six immeubles qui commencent à sortir de terre. Parmi eux, la future tour Signal, pensée pour faire écho aux deux gratte-ciel historiques, en reprenant notamment leur architecture en gradins. La livraison de cet ilot est prévue au printemps 2027. Outre 226 logements, il accueillera le nouveau Monoprix, une crèche et un cinéma avec 4 salles. Initialement prévus pour offrir un nouvel écrin au cinéma Zola, les nouveaux locaux devront finalement faire objet d’un appel d’offres. « Ce sera un cinéma d’art et d’essai, pas un multiplex », assure toutefois Agnès Thouvenot.
Les autres ilots seront livrés entre 2028 et 2031, selon les prévisions confirmées par l’adjointe à l’urbanisme. Au total, le centre-ville villeurbannais s’agrandira de 914 logements et quelque 20 000 mètres carrés de commerces. Originalité locale : toutes les surfaces commerciales appartiennent à la Société villeurbannaise d’urbanisme (SVU), créée en 1931 pour gérer les boutiques du quartier historique. Elle aura pour mission de veiller à une bonne mixité commerciale en centre-ville.
Une nouvelle vie pour les parkings
C’est également la SVU qui portera le projet des Contreforts de Gratte-Ciel : 2300 mètres carrés de restaurants et bureaux, chauffés et rafraichis par géothermie, à l’arrière des immeubles de la rue Henri Barbusse. Le but : apporter un peu d’animation culturelle à la place Chanoine Boursier. Ce grand parking de centre-ville qui accueille un marché trois fois par semaine est promis à un grand toilettage. Exit les voitures pour faire place à de la végétation et de nouveaux usages (aire de jeu, terrasses, présence de l’eau). Le marché sera repensé, mais tous les forains actuels garderont leur place, promet Agnès Thouvenot. Les Contreforts accueilleront leurs occupants fin 2026 tandis que les travaux de la place débuteront fin 2027.
Un autre parking a déjà achevé sa mue : celui situé à l’arrière de la salle des Gratte-Ciel. Le nouveau passage Rey, pensé avec les habitants et les lycéens de Brossolette, a ouvert début juillet. Il propose un espace de glisse adapté aux plus jeunes, un jardin de 1 000 mètres carrés, une aire de jeux, un babyfoot, une table de ping-pong, une autre de teqball, des tables d’échecs et des agrès sportifs. Deux platanes sexagénaires ont été transplantés depuis la cour de l’ancien lycée. Un jardin partagé de 200 mètres carrés complète l’ensemble, conçu pour tous les âges.
Petite ville devenue grande
Dans les années 1930, Villeurbanne comptait environ 80 000 habitants. Aujourd’hui, la ville en accueille presque le double. Il lui fallait donc une centralité adaptée. « Villeurbanne a besoin d’un centre à la hauteur de la 19ᵉ ville de France », avait déclaré le maire Cédric Van Styvendael lors de la pose de la première pierre.
