A l’occasion de la sortie de son livre

Michel Rocard, un « affreux réformiste » à Lyon

« Si ça vous amuse », c’est ainsi que François Mitterand répondait lorsqu’on lui soumettait une idée qu’il jugeait incongrue, se souvient Michel Rocard. Si ça vous amuse, chronique de mes faits et méfaits, s’intitule le nouveau bouquin que l’ancien premier ministre vient de publier. Lundi, il est venu à Lyon le présenter devant une cinquantaine de « camarades ». Celui qui a toujours été « suspect au sein de [s]a propre famille politique », selon ses dires, a alors insisté sur son côté réformateur, une ligne que défend également Gérard Collomb.

« Votre nom ? », demande Michel Rocard à un jeune militant PS, qui lui tend un exemplaire de son livre pour le faire dédicacer. « Arthur » « Un nom de famille ? » « Empereur ». « Faut le porter ce nom-là », moque l’ancien premier ministre, « vous n’avez qu’à dire que c’est un manchot de l’Antarctique ». Michel Rocard est d’humeur badin, ce jour-là au siège de la fédération du Rhône du PS, avalant un morceau de quiche entre 2 signatures.

C’est que son temps est compté. 3 heures à peine avant de remonter à 15h dans le train de retour. « C’est quelqu’un qui n’a pas de langue de bois », le présente une militante PS, fan de longue date. Puis, Rocky, comme on le surnomme, parle de sa vie politique, égratigne la presse qui « fait son boulot de manière curieuse ». Surtout la télé d’ailleurs, car « l’écrit fait travailler les neurones », tandis que « l’image passe à toute allure, gommant tout ». « L’information se vend mal », trouve-t-il, « elle est ennuyeuse mais le spectacle se vend bien. » Dans son livre, il raconte donc « tout ce que la presse n’a pas pris le temps de dire. »

Genre la décentralisation. « Une belle bagarre entre Mitterand et Rocard », se souvient l’homme politique. « Pendant 6 mois j’ai été interdit de séjour à la fédération du Rhône. » « La France n’est pas irréformable mais difficile à réformer. Les réformes qui réussissent le mieux sont ceux qui n’ont pas été annoncés à l’avance », clame celui qui fut premier ministre de 1988 à 1991. Comme lorsqu’il a « sauvé la France de la faillite. » Pour en savoir plus, faut acheter le bouquin.

« Collomb, c’est un vieux copain ! »

Après avoir fini avec les militants, il s’en va rencontrer la presse dans le bureau du secrétaire fédéral Jacky Darne. Une fois vérifié qu’il y ait bien quelqu’un pour le ramener à la gare, il ne lui reste plus que 4 minutes. Les questions fusent alors. Les primaires ? Les anticiper serait « dangereux et suicidaire ». Le projet social ? « On va faire le tri dans les propositions », répond celui qui se considère comme un « socialiste rigoureux », estimant que la PS ne serait « capable que de faire un quart du paquet social », tel qu’il a été présenté.

Des propos qui ne font pas l’unanimité chez les socialistes. Il n’en a cure. « Les réformistes, ce sont des affreux parce qu’ils cassent le rêve. » Puis de vanter le modèle nordique : « Les Suédois sont les plus heureux, bien qu’ils paient le plus d’impôts, car ils les retrouvent dans la qualité de leurs services publics. » Ça tombe bien, Gérard Collomb ne jure, lui aussi, que par le modèle scandinave. Justement, le maire de Lyon dans tout ça ? « Gérard Collomb, c’est un vieux copain », dit-il et s’en va.

Publié le : lundi 22 novembre 2010, par Tony Truand