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Cinéma

Omar m’a tuer

Le 24 juin 1991, Ghislaine Marchal est retrouvée morte dans la cave de sa villa de Mougins. Des lettres écrites avec le sang de la victime accusent : « Omar m’a tuer ». Omar Raddad, un jardinier marocain, est accusé du meurtre. Il sera condamné et incarcéré de 1991 à 1999, date à laquelle Jacques Chirac le gracie, mais reste coupable aux yeux de la justice. Pourtant, il n’aura cesse de clamer son innocence. Un écrivain va mener sa propre enquête.

Tiré d’un fait divers réel, l’affaire avait fait beaucoup de bruit au début des années 90. Coupable confondu par sa victime ou, au contraire, victime d’une erreur judiciaire empreinte de racisme, le rôle d’Omar n’a jamais été élucidé officiellement. Dans le film, l’écrivain Pierre-Emmanuel Vaugrenard, persuadé de son innocence, tente de démêler le vrai du faux. Le spectateur découvrira alors les éléments d’une enquête approximative.

Presque tout semble en effet innocenter Omar. Il n’a aucune trace de sang sur ses vêtements, il ne pouvait pas être sur les lieux au moment du crime, l’inscription sur les murs par une femme agonisante semble plus qu’improbable. Dès lors, Omar apparaît comme une victime de la machine judiciaire.

« On fait du cinéma, ce n’est pas un documentaire », clame toutefois Roschdy Zem, le réalisateur, affirmant vouloir « raconter une histoire tragiquement extraordinaire ». En effet, l’émotion est à l’ordre du jour. Omar Raddad, interprété par un Sami Bouajila habité, est émouvant et suscite un sentiment d’empathie de la part du spectateur.

L’importance réside dans la « dichotomie entre le jardinier et l’écrivain, un homme sans culture et un homme de lettres », poursuit le réalisateur. Omar, un homme silencieux et « épuré », selon Sami Bouajila, est enfermé dans une cellule et oppressé tant par le système judiciaire français que par les close-up étouffants de la caméra. Il perd progressivement espoir, et finit par faire une tentative de suicide avec une lame de rasoir. Vaugrenard, dandy et homme de paroles, est quant à lui en liberté. Son intime conviction de l’innocence de l’accusé s’installe au fur et à mesure que se révèlent les incohérences de l’enquête.

Les deux personnages sont exposés par un va-et-vient des scènes, qui manque de rythme et mène parfois à la confusion. Toutefois, Omar m’a tuer reste un film captivant et profond au sujet des relations humaines : deux personnages provenant de deux mondes opposés vont se rencontrer au travers d’une histoire tragique et se battre pour rétablir la vérité.

Le film aborde l’affaire sans tabou, expose les faits brutalement et sans nuance. Le film a la qualité de ne pas tomber dans un récit manichéen, où l’incarcération injuste d’Omar serait uniquement due au racisme. L’addiction aux jeux d’Omar fait de lui un homme pas tout à fait lisse. Toutefois, même si Roschdy Zem affirme ne pas vouloir prendre parti dans le film mais simplement « ouvrir des interrogations ». Refusant de choisir entre documentaire et fiction, il brouille les pistes et participe à la confusion générale. Le film s’évertue ainsi, sciemment ou pas, à tenter de prouver l’innocence du jardinier. « Ce film n’est pas anodin », admet Denis Podalydès, qui incarne l’écrivain.

Le spectateur sort de la salle mal à l’aise et perdu sur les conclusions à tirer du film. Le regard porté doit-il être celui d’un cinéphile admiratif de l’art du cinéma ou celui d’un citoyen averti et engagé pour que justice soit faite ? « Cette histoire ne m’appartient plus. Elle ne me concerne plus, mis à part en tant que citoyen », conclut Roschdy Zem. Une pirouette un peu facile.

 Long-métrage français
 Réalisé par Roschdy Zem
 Genre : drame, policier
 Avec Sami Bouajila, Denis Podalydès, Maurice Bénichou, Salomé Stévenin, Nozha Khouadra...
 Durée : 1h25
 Sortie : 22 juin

Publié le : mercredi 22 juin 2011, par Mélanie Rauscher