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Cinéma

Case Départ

Deux frères d’origine antillaise opposés en tout : Régis est un conseiller municipal, très intégré à la société française, au point de renier ses racines. José, quant à lui, est un petit délinquant au chômage et blâme la France raciste d’être à l’origine de tous ses échecs. Ils se retrouvent aux Antilles au chevet de leur père, pour assister à ses derniers souffles. Comme héritage, ils reçoivent ce qui est à leurs yeux qu’un vilain papier, l’acte d’affranchissement qui a rendu la liberté à leurs ancêtres esclaves. Ils le déchirent et l’aventure commence alors : Une vieille tante inconnue les punit pour leur indifférence et les renvoie en 1780, au temps de leurs ancêtres, où ils sont vendus au marché comme esclaves. Un film qui se veut engagé, mais qui s’avère être d’une banalité affligeante.

« Le film parle vraiment de notre époque, mais il en parle d’autant mieux que c’est abordé par comparaison directe avec le passé », explique Fabrice Eboué, acteur et réalisateur de Case Départ. Un film qui permet une rétrospective historique dans le passé douloureux des Antilles, pour « ne pas traiter la chose frontalement, pour prendre de la distance », dixit Fabrice Eboué, et par la même mieux souligner les lacunes de la société française actuelle : « Le choix d’une époque lointaine nous paraissait plus judicieux, puisque le racisme était un état de fait », explique Thomas Ngijol, co-réalisateur qui incarne son frère.

Le retour en 1780 libère le propos sur les clichés raciaux, toujours inhérent à la société française : « Nos sociétés contemporaines sont bien plus sournoises [en termes de racisme, ndlr] qu’à l’époque. Mais il ne s’agissait pas non plus de faire le procès de la France », note Fabrice Eboué.

Un thème politique original, puisque le racisme envers les noirs et le passé des Antilles sont très peu abordés dans le cinéma. Le réalisme historique est surprenant, avec des costumes époustouflants et des décors qui reproduisent parfaitement l’ambiance de l’époque : « Chaque scène d’esclavage était éprouvante. Ça fait bizarre », se souvient le réalisateur. Sauf voilà, sous le signe de la comédie, tout est surfait, exagéré, cliché. Les préjugés sont tournés au ridicule. Les maîtres blancs sont bêtes et grossiers et le message du film, décrédibilisé, disparaît derrière un écran de fumée fait d’humour puéril. Si l’intention était bonne, dommage que la réalisation soit aussi pauvre.

Au lieu d’être drôles, les blagues sombrent dans le pipi-caca, digne d’une comédie grand public américaine. En guise de références, la moindre scène tourne au déjà-vu mille fois. Malgré l’intention avancée des réalisateurs de ne pas « surcharger, de trouver un bon équilibre pour que ça reste léger et frais », le résultat est indigeste. Le maître des esclaves, complexé par la taille de son engin, ne cesse d’évoquer à chaque tournure de phrase le gros sexe des esclaves noirs. Une façon de détourner les préjugés certes, mais de manière lourdingue. Sans parler de la scène où ils forcent et aident physiquement leurs ancêtres ivres et inconscients à se reproduire : « On ne s’est pas censuré dans les blagues », se félicite Thomas Ngijol. On avait remarqué. Tout est dans l’excès, sans profondeur et truffé de clichés.

Le jeu comique des acteurs est du déjà-vu : les mimiques, les répliques, rien ne surprend. Les deux frères reprennent le schéma type des figures comiques : Le frère rusé s’exaspère face à la bêtise du frère idiot, tandis que l’imbécile ne supporte pas les manipulations habiles de l’autre. Un sketch à rallonge qui se transforme en expérience cinématographique douloureuse.

- Long-métrage français
- Réalisé par Fabrice Eboué, Thomas Ngijol, Lionel Steketee
- Avec Fabrice Eboué et Thomas Ngijol
- Durée : 1h34
- Sortie : 6 juillet

Publié le : mercredi 6 juillet 2011, par Mélanie Rauscher