Ballet de l’Opéra de Lyon

Balanchine se prend les Millepied dans le tapis

Le Ballet de l’Opéra de Lyon a proposé du 17 au 23 décembre une pièce de Balanchine et deux de Benjamin Millepied, un ancien du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Lyon (CNSMD) et danseur étoile de Balanchine. Bilan de la dernière représentation : un Balanchine peu gracieux et un Millepied frustrant.

Si Balanchine est un monstre sacré, ne le danse pas qui veut. Question technique, rien à redire. Question grâce et légèreté, c’est néanmoins à revoir. La musculature saillante des épaules des danseuses s’accorde mal avec l’univers tout en grâce et en légèreté de ce Concerto Barocco du maître du New York City Ballet.

Et les sourires à la miss France des deux grandes - en taille - ballerines solistes du premier plan étaient pour le moins crispants. Tout comme la lourdeur et le bruit de leurs pieds retombants… Un bémol toutefois : une énergie et une émotion agréable chez quelques-unes des danseuses du petit corps de ballet.

Changement de rythme avec les deux pièces de Millepied, fort heureusement plus modernes. Sarabande a donné à voir quatre danseurs sur sept séquences construites sur des extraits de Jean-Sébastien Bach (la Partita pour flûte seule et Sonates N°1 et 2 ainsi que Partita n°1 pour violon seul).

Les danseurs, trapus, musclés, énergiques – on aime ! – ont eu du mérite de danser au son d’une flûte enrouée et d’un violon grippé… Fatigue des musiciens solistes sur scène ? Mauvais choix musical ? La qualité des danseurs - notamment le dernier entré sur scène, vêtu d’une chemise à carreaux bleue - aurait sans doute méritée une musique plus entraînante ! D’autant plus qu’ils étaient chacun affublés de chemises fluo à rayures ou à carreaux !

La dernière partie du programme, This part in darkness, également chorégraphiée par Benjamin Millepied, était sans doute la meilleure, et pourtant... Musique moderne, inclassable, de David Lang, duo intimiste, énergie et vitesse des 17 danseurs, la pièce commençait bien. Mais alors que deux projecteurs apparaissent sur scène et que l’on s’imagine la création d’un jeu de lumière et de danse avec le duo de danseurs, pffft ! les projecteurs disparaissent. Frustrant.

La musique n’y va pas franchement non plus. Au tout début, on entend des bruits parasites de mauvaise communication téléphonique ? Une idée sonore originale, moderne, mais qui se mêle désagréablement au reste de la musique : on aurait sans doute préféré entendre séparément les bruits parasites au début, symbole de notre vie moderne stressante, puis la musique elle-même. Même manque de franchise pour une sonorité africaine qui survient à un moment dans l’univers musical de David Lang : là aussi, on aurait aimé plus de temps, de corps, de chaleur de densité à cette sonorité qui se serait parfaitement accordée à l’énergie des danseurs.

Frustrant également les arrêts des danseuses qui n’en sont pas vraiment, puisqu’elles freinent d’elles-mêmes avant que les danseurs ne les arrêtent ! Dommage, l’idée était bonne. Enfin, le programme annonçait « une caméra en direct », mais de caméra, point.

Bref, l’ensemble pêche par manque de poésie, d’émotion, d’harmonie. Même si certains et certaines se sont précisément démarqués en raison de leur émotion propre. Sans douter un seul instant de l’immense talent de Benjamin Millepied en tant que danseur, le chorégraphe, lui – en tout cas ce qu’il a montré le 23 décembre 2011 à l’Opéra de Lyon – doit apprendre à faire des choix. Et surtout, aller jusqu’au bout de ses idées.

Publié le : dimanche 25 décembre 2011, par Florence Leray