Rétrospective

Erró, précurseur des temps modernes, exposé à Lyon

Le Musée d’art contemporain de Lyon consacre une rétrospective à l’artiste islandais Erró, l’une des grandes figures de l’avant-garde européenne. Quelque 550 œuvres invitent à en appréhender le travail des années 50 à nos jours.

Virtuose du collage, c’est par ce medium que l’œuvre d’Erró sera connue du grand public. Souvent rattachée aux mouvements surréalistes et pop art, elle est toutefois bien trop complexe pour être réduite à un seul de ses mouvements.

Pénétré de l’idée que « tout, absolument tout, a déjà été photographié, filmé, dessiné », Erró n’a eu cesse de recueillir des milliers de documents visuels (bandes dessinées, caricatures, affiches de propagande politique, publicités, reproductions d’œuvres d’art, estampes érotiques, cartes postales…) dont il se servira pour construire ses tableaux souvent monumentaux.

Sans être un véritable critique de la société comme certains artistes du pop-art aux États-Unis, Erró utilise le présent pour créer des peintures qu’il veut être « de son temps et refléter son époque ». Véritable précurseur du collage, il sème le trouble dans ses tableaux aux multiples interprétations, qui donnent à réfléchir, à créer des liens parfois drôles, revendicateurs, idéalistes, tout en gardant un regard ironique sur le monde qui l’entoure.

Approche thématique et chronologique

L’exposition, qui s’étend sur les trois étages du musée, soit 3000 m² de surface d’exposition, offre des entrées à la fois chronologique et thématique. Tout débute par une sorte d’antichambre, une pièce où les tableaux s’empilent de façon anarchique. « Comme Erró fait des montages, on s’est amusé de faire un montage avec ses œuvres », rigole Thierry Raspail, le directeur du musée. Par son foisonnement d’images et de couleurs, cette salle n’en est pas moins à l’image de l’artiste, représentative de tous les styles et toutes les époques de son œuvre.

Le premier étage du musée est consacré à la période la plus ancienne de la carrière d’Erró, les années 1955-1964. On y trouve ses aquarelles, ses Méca-Make-up, des compositions mêlant machines et pièces usinées à des visages de mannequins, et bien d’autres concepts étonnants. Les deux autres étages suivent une trame chronologico-thématique, présentant diverses séries picturales ou des supra-séries, telles les « scapes », des assemblages de motifs sous un thème commun, les « portraits » ou les « peintures d’histoire », comme l’importante série consacrée à la Chine de Mao ou encore à la guerre en Irak.

Flux d’images

A l’ère d’internet et des réseaux sociaux, l’œuvre d’Erró s’avère plus actuelle que jamais. « Nous vivons dans une culture de l’écran avec des flux d’images qui viennent de partout et de nulle part », explique Thierry Raspail. « On se rend compte qu’avec de tout petits ciseaux et de la colle, et dans le format du tableau qu’on pourrait croire anarchique, Erró a anticipé tout cela il y a 40 ans. » Bien avant le culte de l’image, Erró a ainsi réussi à imaginer et créer matériellement ce que l’on vit aujourd’hui. Ses peintures-collages vifs, saturés et souvent trop criants deviennent le miroir de notre monde occidental.

A noter que l’artiste islandais a offert au Musée d’art contemporain le tableau Silver surfer, une toile imposante consacrée au super héros éponyme de la série des Quatre fantastiques.

Info : jusqu’au 22 février 2015, Musée d’art contemporain, Cité Internationale, 81 quai Charles de Gaulle, Lyon 6ème. Tarifs : 8 € / 6 €.

Publié le : vendredi 10 octobre 2014, par Betty Yamanjian