Un bouleversement pour les habitants

Maison d’Assise : des pauvres chez les riches du 6ème

L’opération a failli ne pas voir le jour. 62 logements sociaux et 35 chambres d’étudiant ont été livrés lundi matin par Habitat et humanisme dans le très huppé quartier de la Tête d’or. Un chantier réalisé avec 2 ans de retard, en raison d’une guérilla judiciaire livrée par un collectif d’habitants.

« Il y avait beaucoup de peurs, d’attaques, de violence », se souvient le cardinal Philippe Barbarin. A coup de pétitions et de procès, habitants mais aussi parents d’élève de l’école maternelle en face, ont tenté de faire échouer le projet.

Leurs arguments : des loyers sociaux qui feraient baisser la moyenne du quartier, ou encore la hauteur du bâtiment. « Que des arguties », s’indigne père Bernard Drevet, fondateur d’Habitat et humanisme, une association catholique qui agit depuis 25 ans en faveur du logement et de l’insertion des plus démunis. « J’ai dû déposer un recours pour discrimination sociale pour qu’ils arrêtent. »

« Il y a des pauvres, il y a des gens différents, ça fait beaucoup », ironise Jean-François Carenco, le préfet du Rhône, qui a soutenu le projet. « L’État a marqué beaucoup d’attention au paradigme de la mixité sociale », reconnaît Bernard Drevet.

L’immeuble, à l’angle entre la rue Trochet et la rue Tête d’or (Lyon 6), a été construit à la place de l’ancien couvent des Sœurs Franciscaines. Plus qu’au nombre de 3, celles-ci occupent d’ailleurs l’un des appartements du nouvel immeuble.

Baptisé Maison d’Assise, il comprend 62 logements, dont 28 vendus en accession sociale (3800 euros/m²) et 34 proposés à la location sociale (entre 5 et 9 euros/m²). Des prix défiant toute concurrence dans ce quartier où les appartements se négocient entre 5 et 6000 euros/m². « Des logements abordables » se réjouit le président d’Habitat et humanisme, en ligne avec l’ambition de l’association d’obtenir un logement pour tous. « Il est difficile de souhaiter un joyeux Noël, lorsque des familles n’ont pas de toit. »

Ici, le concept de mixité est poussé jusqu’au bout. Les appartements sociaux partagent le même pallier que ceux en accession, et les prestations sont les mêmes. « Personne ne peut savoir lequel est un logement social », se félicite Bernard Drevet.

Une organisation qui a permis à l’architecte Didier-Noël Petit de lancer une pique à Gérard Collomb. « A la Duchère, sur un lot, on réserve un immeuble à l’Opac et vend les 3 autres aux promoteurs privés », a-t-il persiflé. « Le jour où on arrive à la mixité sociale à l’intérieur d’un bâtiment, on aura fait un grand pas en avant. La vraie mixité est celle des hommes. »

Publié le : lundi 19 décembre 2011, par Michael Augustin