Hôtel de région

Expo : Georges Rousse - photographe et illusionniste

La photo d’une pièce abandonnée, un rond bleu dessiné dessus. Voici l’affiche de l’exposition Utopies partagées de Georges Rousse (photo). A première vue, l’œuvre parait banale. Deux images superposées, une manipulation anodine dans Photoshop. Sauf que... la photo n’a pas été retouchée. Le rond bleu, ainsi que l’ouverture du sol et du plafond sont bien réels. Un travail en anamorphose minutieux et une maitrise totale de la perspective au service de l’illusion parfaite. Le tout doublé d’un engagement social. Époustouflant.

Une quarantaine d’œuvres du photographe parisien sont exposées sur le Plateau, l’espace culturel de l’hôtel de région. Elles invitent à « retracer les grandes étapes de cet artiste singulier qui fusionne peinture, sculpture et architecture dans l’art photographique », s’émerveille Jean-Jack Queyranne, le président du conseil régional.

L’exposition se décline en cinq espaces qui accueillent des clichés réalisés entre 1982 et 2014. Pour comprendre le travail de Georges Rousse, mieux veut commencer par le troisième espace. On y trouve la reproduction fidèle du local d’une association humanitaire indienne qui intervient à Shivaji Nagar, l’un des plus grands bidonvilles du pays. Sur le sol, les murs et le plafond : une figure polyforme dessinée à la craie. Quand on se tient précisément à l’endroit marqué d’une étoile au sol, cette figure se transforme en un cercle parfait qui semble flotter dans l’espace.

« Collectionneur d’espaces, je parcours le monde au hasard des invitations », note le photographe. Entre Palerme et Montréal, Fukushima et Houston, Georges Rousse a néanmoins souvent fait escale en Rhône-Alpes. Un théâtre incendié à Bourgoin-Jallieu, la prison Saint-Paul à Lyon, une boulangerie abandonnée à Chasse-sur-Rhône ou encore une ancienne droguerie à Villeurbanne lui ont servi de support pour ces créations. « Je travaille souvent dans des lieux abandonnés sans qualité architecturale particulière », précise l’artiste pour qui « a photo est un outil de mémoire », dans ces lieux souvent voués à la démolition.

C’est aussi en Rhône-Alpes que Georges Rousse, grand prix national de la photographie en 1993, a commencé à travailler avec des jeunes en insertion. En 1997, il rencontre à Lyon un éducateur spécialisé. Ensemble, ils décident de monter un projet avec des adolescents en difficulté du lycée spécialisé de Sacuny pour lesquels cette expérience humaine et pédagogique est souvent le premier contact avec le monde de la culture.

Ils investissent une bâtisse à l’abandon à Saint-Genis-Laval. Souvent quand les lieux lui paraissent trop vastes et vides, Georges Rousse décide de les transformer. « On cassait ce qui pouvait être cassé », se souvient le photographe. Puis, ils ajoutent des éléments, construisent des escaliers, rampes, colonnes, des plans qui semblent en lévitation. « Au début, les jeunes ne comprenaient pas ce qui allait se passer », rigole l’artiste. Ce n’est qu’après une semaine de travail, sur la photo finale, qu’ils ont découvert l’œuvre à laquelle ils ont contribué. L’exposition à l’hôtel de région rassemble « tout ce travail afin de montrer que l’art peut être un outil pédagogique d’une grande efficacité », conclut Georges Rousse.

Info : jusqu’au 26 juillet, du lundi au vendredi, de 10h à 18h, le samedi de 10h à 19h, Hôtel de région, 1 esplanade François Mitterrand, Lyon 2ème (Confluence).

Publié le : jeudi 24 avril 2014, par Michael Augustin