Musée d’art contemporain
Ben aime provoquer. Ben est provocation. Et son sujet de prédilection est le sexe. « Je bande moins », répond-t-il quand il doit expliquer la différence entre l’artiste qu’il fut à ses débuts et celui qu’il est aujourd’hui. « Mais je reste jeune. » En tout cas, impertinent.
« L’art moderne n’est pas compliqué. Il suffit d’apporter quelque chose qui n’était pas là avant », explique Benjamin Vautier, 74 ans, Ben pour les intimes. Depuis mercredi, le Musée d’art contemporain expose plus de 1000 de ses œuvres retraçant toute sa carrière. Dont les si caractéristiques tableaux minimalistes, ornés de quelques mots, parfois que d’un seul, de son écriture ronde et faussement naïve. « D’autres comme Magritte ou Francis Picabia ont utilisé l’écriture dans leurs œuvres, mais d’une façon différente, pas exclusivement », explique Jon Hendricks, le commissaire de l’exposition. « Ben estime que ces écritures suffisent à elles-mêmes. » Le premier étage de l’exposition, qui retrace l’œuvre de Ben de manière chronologique, est quasi exclusivement dédié à ces tableaux. Mais on y découvre aussi que Ben avait passé en 1962 deux semaines dans la vitrine de la galerie londonienne Gallery One. Appliquant ainsi sa maxime « Tout est art », qu’il clame depuis le début des années 60. Un peu plus loin, sur un mur entier, le musée expose un travail de Ben sur les gestes, en photo et texte : Ben mange, dort, fait des grimaces, coupe la moitié de sa barbe, a honte, mais aussi crache ou vomit.
Changement d’étage, changement de décor. Un écriteau « Il ne vous est pas interdit de tourner un film érotique dans cet ascenseur. Imaginez le scénario » rappelle au visiteur, si besoin, qu’il est toujours chez Ben. Arrivé au second niveau, il découvre la machinerie de l’artiste. Ici, tout est dans le surchargé. Explosion de couleurs, d’objets, de formes. On y trouve le Bizart Baz’art, une cabane monumentale de 5 tonnes, habituellement entreposée au rez-de-chaussée du musée et déplacée pour l’occasion. Mais aussi un baby foot, un ballon suspendu par une ingénieuse soufflerie d’air ou encore une machine à faire briller les chaussures sous un tableau L’art sert à cirer vos godasses.
« Ben est un artiste engagé politiquement et socialement », affirme Jon Hendricks. Ainsi un tableau au troisième étage montre la tour de Babel, version Ben. Pour punir les hommes, Dieu leur envoie les langues, explique l’artiste. « Et Ben dit à Dieu : "c’est bien". J’aime la diversité. Sinon ça s’appelle l’impérialisme », explique ce natif de Naples et Niçois d’adoption, qui garde de sa mère irlandaise un accent british savamment entretenu. « J’aurais voulu être un emmerdeur mais je n’ai pas le courage », dit-il. Et de confier qu’il a envie de faire du cinéma. « On prend une caméra, on s’intéresse à toi et on a un film d’auteur. » « Chez moi, il ne faut pas faire d’effort, je veux être compris par tous », clame l’artiste. Il réfute le terme rétrospective. « Ça met un point final. Je ne suis pas encore mort. »
Sa conférence de presse, il la donne dans un lit sous une inscription néon : voulez-vous coucher avec moi ?. « Être au lit est agréable, sinon on finit par avoir mal au pied », sourit Ben sous sa couette. « On peut lire, avoir quelques fantasmes. » Est-il content de l’exposition ? « Je suis très heureux, car je vois un tas de belles femmes. » Et de conclure : « J’aime les femmes nues, c’est vrai. »
Infos : du 3 mars au 11 juillet au Musée d’art contemporain, Cité Internationale, 81 quai Charles de Gaulle, Lyon 6ème. Tarif normal : 8 €, réduit : 6 €. Horaires : du mercredi au vendredi de 12h à 19h, samedi et dimanche de 10h à 19h.
Publié le : mercredi 3 mars 2010, par