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Cinéma

Tête de turc

Bora, 14 ans, est un jeune turc de la cité. La violence fait partie de son quotidien, les bandes s’affrontent, les dealers font la loi. Les esprits s’échauffent quand la police fait une descente pour démanteler un trafic de drogue. Simon, médecin urgentiste, qui passe par là, est pris pour cible par les jeunes. Laissé pour mort dans sa voiture en flammes, il est sauvé par Bora. Quelques instants auparavant, c’est lui qui avait jeté le cocktail molotov fatal. Au même moment, la femme que Simon devait aller soigner, meurt. Le médecin, son policier de frère en quête de vengeance, le mari anéanti par la mort de sa femme et Bora voient leurs destins désormais liés.

Pascal Elbé, qui officiait jusqu’alors surtout devant la caméra ou bien comme scénariste, signe ici sa première réalisation. Un polar noir et efficace sur la violence, mais aussi sur les liens familiaux, les non-dit, la culpabilité, les femmes courage qui élèvent leurs enfants dans des conditions difficiles, la vengeance et le pardon. Le montage adopte la violence du propos, la caméra plonge le spectateur au cœur de l’action, avant de lui permettre de prendre du recul et de comprendre la scène.

Pour son galop d’essai, Pascal Elbé s’est entouré de valeurs sûres comme Roschdy Zem, Florence Thomassin ou Simon Abkarian. Tous les jeunes, en revanche, n’avaient encore jamais travaillé devant une caméra. « Comme ça c’était la rentrée de classes pour tout le monde », réalisateur compris, sourit Elbé. « Ce n’était pas plus mal. » Les jeunes ont été repérés lors de « castings sauvages dans les lycées ». Cela a permis de révéler un nouveau talent, celui du jeune Samir Makhlouf qui joue Bora et porte le film pour ses débuts au cinéma. Le seul maillon faible du casting est Ronit Elkabetz qui incarne la mère de Bora. Tout au long du film, elle paraît ailleurs, alors que son rôle la veut présente et forte.

Tête de Turc est le fruit d’une recherche fouillée. « J’ai rencontré des travailleurs sociaux, des urgentistes et des flics », raconte le metteur en scène. « J’ai même demandé au patron de la Brigade criminelle de relire mon scénario pour détecter d’éventuelles erreurs. » Un scénario haletant et authentique, chargé d’une violence contenue, intime aussi bien que publique et familiale. Les secrets, un temps cachés éclatent au grand jour. Le film parle de responsabilité et de conscience. A l’instar de Simon le médecin, il cherche à comprendre sans victimiser.

La bande originale de ce film choral est signé Bruno Coulais, compositeur des Choristes. Elle prouve qu’on peut filmer des cités sans mettre du rap en fond musical. Tourné en 6 semaines au lieu 9 prévues, en raison d’un budget riquiqui (moins de 3 millions d’euros), le film se termine comme une tragédie grecque. « Je voulais une fin triste qui montre que chaque geste a un poids », affirme le réalisateur, qui fourmille déjà de nouveaux projets. « J’ai des idées pour 4 ou 5 nouveaux scénarios », note Pascal Elbé qui a visiblement pris goût au métier de metteur en scène. « Le paradis c’est si le film rencontre un public », clame-t-il. Ce n’est pas trop mal parti.

- Long-métrage français
- Réalisé par Pascal Elbé
- Avec Roschdy Zem, Samir Makhlouf, Pascal Elbé, Ronit Elkabetz, Simon Abkarian...
- Durée :1h27
- Genre : Drame, Policier
- Site officiel : www.tetedeturc-lefilm.com
- Sortie : 31 mars

Publié le : lundi 29 mars 2010, par Michael Augustin