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Cinéma

La rafle

16 juillet 1942. A 4h du matin, 4000 policiers et miliciens français quadrillent Paris à la recherche des 24 000 juifs fichés par la France de Vichy. 13 152 d’entre eux, dont 4115 enfants ont été raflés ce matin-là. En même temps, quelques 10 000 autres ont été cachés par des Parisiens, au péril de leur vie. C’est l’histoire de la rafle du Vel d’hiv, la plus grande arrestation massive de Juifs réalisée en France pendant la seconde guerre mondiale, que la cinéaste et ancienne journaliste Rose Bosch a choisie de raconter.

Tourné le plus souvent à hauteur d’enfants, le film raconte, à travers un garçon de 11 ans, Joseph Weisman, l’horreur vécue par ces milliers de Juifs. Arrêtés chez eux au petit matin, entassés pendant des jours au Vélodrome d’hiver dans des conditions sanitaires épouvantables, puis conduits au camp de Beaune-la-Rolande, ils ont fini massacrés à Auschwitz. Seuls 25 d’entre eux sont revenus du camp d’extermination. Rose Bosch s’est alors mis à la recherche de ces quelques survivants. « Je voulais que mes personnages principaux soient réels. Or, la plupart des adultes de l’époque ont déjà disparu. Restent ceux qui étaient enfants. Sauf qu’ils ont près de 80 ans aujourd’hui. Dans 10 ans, il ne restera plus aucun survivant. C’est pour cela qu’il était important que le film se fasse maintenant. » Autre difficulté, les survivants qu’elle avait trouvés étaient des évadés de la première heure. Ils ont soit été cachés dans les placards, soit réussi à s’échapper du vélodrome, et n’ont donc pas connu les camps du Loiret.

Ayant, pendant 3 ans, compilé des centaines d’archives, recueilli des témoignages, lu des lettres, visionné des centaines d’heures de documents vidéo, elle tombe sur un documentaire datant de 15 ans. A la fin, elle entend un homme déclarer en sanglots : « si jamais quelqu’un, un jour, fait un film sur ce qui nous est arrivé... Non, je pense que personne n’osera. » Joseph Weisman. Ayant réussi à s’échapper avec un autre garçon du camp de Beaune-la-Rolande, rampant sous 5 m de barbelés, il avait survécu. Par chance, ce même Joseph Weisman a écrit en 1995 à Jacques Chirac, pour le remercier d’avoir reconnu la responsabilité de la France dans la rafle du Vel’d’hiv, laissant une adresse au Mans. Rose Bosch lui écrit : « ce film dont vous parliez, je suis en train de le faire ». Il répond. Dans le film, il fait une brève apparition avec son petit fils dans une scène au Vel d’hiv.

Mais la réalisatrice ne se contente pas de plonger le spectateur dans l’intimité des Weismann, et des autres familles juives de Montmartre, de montrer des enfants qui jouent, des parents qui font confiance à l’État français, malgré l’étoile jaune cousu sur leurs vestes, des familles humbles et travailleuses. Cette vie de tous les jours est mise en miroir avec celle des bourreaux. On voit Hitler sur la terrasse du Berghof, sa résidence secondaire bavaroise, jouer avec les enfants de ses invités. Hitler végétarien qui ne supporte pas le cruauté faite aux animaux. Puis, Hitler exigeant « de la cendre » en parlant des fours crématoires qu’il était en train de faire construire à Auschwitz. On voit Pétain, qui apprend que les nazis ne voulaient, au départ, pas déporter d’enfants, trouvant cela « fâcheux » puisque les services sociaux français risquaient d’être débordés. Et Laval marchandant avec l’occupant.

Quant à la vie parisienne, Rose Bosch se garde de tout manichéisme. Elle montre la boulangère, trop contente d’être débarrassée de la « vermine juive », mais aussi la concierge qui donne l’alerte quand la police arrive. Il y a le gendarme qui a « des ordres » et les exécute de peur d’être fusillé et celui qui tabasse des femmes sans défense. Il y a les pompiers qui, malgré les ordres, donnent à boire aux prisonniers du Vel d’hiv, et vont poster les lettres que les raflés leur ont remises.

Le film a été en partie tournée en Hongrie, où a été reconstitué un quart du Vélodrome d’hiver, détruit après la guerre. Alors qu’il raconte les destins d’inconnus, Rose Bosch a choisi de s’entourer d’une brochette de stars du cinéma français, comme si elle avait peur que son film ne marche pas sans têtes d’affiche. Si Sylvie Testud et Mélanie Laurent sont bouleversantes en mère juive et infirmière protestante, la présence de Jean Réno et de l’humoriste Gad Elmaleh n’apporte rien. Pire, elle pipolise ce qui est une histoire d’anonymes. Une histoire dont la réalisatrice prévient en ouverture du film que « tous les évènements, même les plus extrêmes, ont eu lieu cet été 1942. »

- Long-métrage français
- Réalisé par Rose Bosch
- Avec Mélanie Laurent, Jean Reno, Gad Elmaleh, Raphaëlle Agogué, Sylvie Testud, Hugo Leverdez...
- Durée :1h55
- Genre : Historique, Drame
- Site officiel : http://larafle.gaumont.fr
- Sortie : 10 mars

Publié le : lundi 8 mars 2010, par Michael Augustin