Apéro

Pas de saucisson à la Guill’

Créé il y a à peine 72 heures, le projet d’un Apéro géant rosette et pinard à la Guillotière a fait long feu. Vendredi après-midi, son initiatrice s’est retirée de l’organisation en dénonçant « d’importantes pressions policières ».

A peine l’Apéro saucisson pinard dans le très cosmopolite quartier de la Goutte d’Or à Paris interdit par la préfecture, qu’il fait déjà des petits en province. A Toulouse, Lille, Nantes ou Rennes, mais aussi dans des villes moyennes comme Valence, Amiens ou Douai, on assiste à une surenchère d’initiatives similaires, portées souvent par des mouvements identitaires et lancées, elles aussi, depuis le site Facebook. Lyon ne fait donc pas exception à la règle. Seule la dénomination a été un peu localisée, le saucisson ayant été remplacé par la rosette lyonnaise.

Son organisatrice, Julie Trahot, se défend de toute intention rasciste. « La Guillotière est également mon quartier, je ne vois pas en quoi ça créerait un problème », affirme-t-elle sur TLM. En avouant néanmoins (sur Radio Scoop, cette fois-ci) que l’idée lui est venue « suite à l’apéro organisé à Paris » et qu’il s’agit pour elle de dénoncer qu’« on ne peut plus trouver du cochon à la Guillotière [et qu’]on est obligé d’aller dans d’autres quartiers. »

L’initiative a fait recette sur Facebook. La page comptait quelque 2100 membres au moment de son annulation. Vite repris par des sites identitaires, il serait néanmoins réducteur d’assimiler tous les inscrits à l’extrême droite. Si des propos ouvertement islamophobes y ont bien été tenus (« Les Muz doivent être en train de japper inshalla alla u akbar à tue tête ce soir. Avec la complicité des autorités et des MEDIAS qui sont tous des collabos. »), la plupart restaient modérés. Ci et là des discussions se sont même engagées entre pourfendeurs de « l’islamisation de notre pays » et (rares) adversaires de l’apéro.

La Grande Mosquée de Lyon, la Licra Rhône-Alpes et les Jeunes socialistes avaient demandé l’interdiction de l’apéro Facebook, emboîtant le pas à d’autres associations comme SOS Racisme, la Ligue des droits de l’homme (LDH) et la Lesbian and Gay Pride.

Julie Trahot dit ne pas comprendre « l’indignation médiatique et politique ». « Il suffit de comparer le traitement entre le "kiss-in gay" devant la cathédrale St-Jean et cet Apéro », écrit-elle dans son message aux membres de son groupe. « L’un est "provocateur" et "haineux", l’autre bénéficie de toutes les complaisances... Pourtant, le principe est totalement identique. » Et de conclure : « si quelqu’un prend la responsabilité de lancer une seconde initiative je serais présente. » Sur sa page les idées sont d’ores et déjà en train de fuser. Les uns proposent un flash mob, les autres suggèrent d’annoncer un lieu et de se rassembler ailleurs. Il y a des chances qu’on en entendra encore parler de rosette et pinard.

Publié le : vendredi 18 juin 2010, par Michael Augustin