Grève

Les ouvrières déterminées à poursuivre l’occupation de Lejaby

Les 197 salariées de la société Lejaby, menacées de perdre leur emploi n’ont rien obtenu de plus aujourd’hui. Une réunion entre la direction et le Comité central d’entreprise s’est conclue par un statu quo. L’occupation du siège social à Rillieux-la-Pape risque donc de se poursuivre. « Le mouvement va se durcir », promet Jeanine Caillot, déléguée syndicale CGT.

Il est 12h quand les représentantes du Comité central d’entreprise (CCE) sortent de la table des négociations, au terme d’une réunion avec la direction qui aura duré à peine 1 heure. « C’est bloqué », résume Nicole Mendez, déléguée CFDT. « La direction campe sur ses positions », complète sa collègue de la CGT. Les syndicats réclament le maintien du site de Bourg-en-Bresse, un moratoire de 2 ans sur les licenciements ou, à défaut, une prime de départ de 25 000 euros plus 100 euros par année d’ancienneté. En face, la direction propose 10 000 euros plus 420 par année. « C’est totalement insuffisant », s’écrient les syndicats.

« L’emploi, ce n’est pas ce qui court les rues », s’insurge Nicole Mendez. « Ce sont toutes des femmes, plus difficile à reclasser. Là où elles habitent, il n’y a rien. » A l’issue de la réunion ce matin, la direction a proposé aux syndicats de les rencontrer individuellement. « C’est une manœuvre pour nous diviser », s’étrangle Jeanine Caillot de la CGT.

Pour se justifier, la direction invoque « la situation économique difficile traversée par Lejaby », qui emploie 652 salariés dans la région. Si la marque a effectivement perdu un quart de son chiffre d’affaires depuis 2 ans, elle réalise néanmoins un résultat net de 1 147 000 euros en 2009. D’après le rapport du cabinet d’expertise-comptable sollicité par le CCE, et que Lyon Info s’est procuré, le bénéfice devrait même monter à 1 667 000, puis 1 985 000 euros pour les 2 exercices qui suivants. « Il n’y a pas de motif économique à cette restructuration annoncée », conclut le rapport.

L’occupation continue

Depuis jeudi, les salariées occupent le siège social de Lejaby à Rillieux-la-Pape. Ce matin, elles étaient une centaine. La plupart se relaient. Pas Yolande, ouvrière à l’atelier de Bourg-en-Bresse. Avec son duvet, elle a dormi les 5 dernières nuits dans l’une des salles de réunion. Lunettes de soleil noires, un thermos de café à ses pieds, elle a pris place dans l’une des nombreuses chaises pliantes installées devant l’immeuble. « Le moral est bon », assure-t-elle. « On est de plus en plus nombreux. »

A 11h, elles sont rejointes par une centaine de salariés du siège. Une grève d’1 heure pour marquer leur soutien. Bien que ne faisant pas partie du plan social, ils sont inquiets. « Aujourd’hui ce sont elles, demain nous », glisse Évelyne de l’atelier de création.

Des voitures et camions passent en flot continue devant l’entreprise. Certains klaxonnent. « La solidarité fonctionne », se réjouit Évelyne Martinez, déléguée CGT sur le site de Rillieux. « Les gens nous donnent 5, 20 ou 25 euros ou de la nourriture pour qu’on tienne. » « On restera ici jusqu’à ce qu’on obtienne satisfaction », affirme Yolande. « On va manger la bûche de Noël ici », prédit Monique, une autre salariée de l’atelier de Bourg.

Entre les mains des juges

A 13h30, une vingtaine d’ouvrières avaient rendez-vous au Tribunal de grande instance de Lyon, où le CCE a attaqué l’entreprise pour faire annuler le plan social. Le motif invoqué est un procès intenté par l’actuel propriétaire de Lejaby, le groupe autrichien Palmers Textil, au précédent propriétaire, l’américain Warnaco, en vue de casser la vente. « Cet élément important n’a pas été porté à la connaissance des représentants du personnel, comme la loi le prévoit », explique Me Pierre Masanovic, l’avocat des syndicats. S’il obtient gain de cause, l’entreprise devra reprendre la procédure à zéro. Mais l’homme de loi souhaite aller plus loin. « Si Palmers gagne son procès, il récupère 45 millions. Ca change tout. » Un précédent juridique. Me Joseph Aguera, qui défend la partie adverse, se montre confiant : « Ça se fera peut-être dans 3 à 4 ans. D’ici-là, il faut que la direction fasse tourner l’entreprise. » Verdict dans 4 semaines.

Publié le : mardi 21 septembre 2010, par Michael Augustin