Après le tremblement de terre au Japon

Séisme et nucléaire : quel risque en Rhône-Alpes ?

« La situation au Japon continue d’empirer d’heure en heure, les autorités et l’opérateur électrique ont perdu le contrôle de ce qui se passe », s’alarme Xavier Rabilloud, porte-parole du réseau Sortir du nucléaire à Lyon. Alors qu’un scénario semblable à la catastrophe de Tchernobyl semble se profiler au pays du soleil levant, l’inquiétude gagne également la France et la région Rhône-Alpes. A tort ou à raison ? Quel est le risque d’un accident nucléaire majeur ?

La France est le deuxième pays le plus nucléarisé au monde (après les États-Unis), et même le premier par rapport au nombre d’habitants. L’Hexagone compte 58 réacteurs en activité, repartis dans 19 centrales. Avec 4 centrales et 14 réacteurs, un quart de la production nucléaire française se concentre en Rhône-Alpes. Or, c’est également dans le quart Sud-est de la France que le risque d’un tremblement de terre est le plus élevé. La région Rhône-Alpes est classée pour sa majeure partie en risque « modéré » ou « moyen ». Ce n’est qu’aux Antilles que le danger est encore plus important.

« La région est typiquement exposée à des séismes pouvant atteindre une magnitude 6 », écrit l’Institut des risques majeurs (Irma) de Grenoble sur son site. Statistiquement, un tel tremblement de terre se produit 1 fois tous les 300 ans, selon l’institut. « Ce sont de simples statistiques », s’étrangle Xavier Rabilloud. « Un tel évènement peut se dérouler dans 300 ans ou dans 15 jours. »

« Le risque sismique est modéré en France par rapport au Japon », relativise toutefois Grégoire Deyirmendjian, chef du bureau lyonnais de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Il ajoute que « les centrales françaises ont été conçues pour résister à un certain niveau de séisme ». Selon ses explications, les normes anti-sismiques qui ont prévalu lors de leur construction, se sont basées sur le pire tremblement de terre connu dans la région concernée, supposant qu’une telle secousse se reproduirait à l’endroit même de la centrale, tout en y ajoutant encore une marge de sécurité.

Or, les 4 centrales rhônalpines ne sont pas toutes jeunes et la connaissance du danger sismique a considérablement évolué ces 25 dernières années. Ainsi en 1986, seul le site du Tricastin était situé dans une zone considéré à risque (voir carte ci-dessous). Il est en effet encadré par 2 failles européennes, celles de Nîmes et des Cevennes. Depuis, le gouvernement a réévalué la situation et toutes les 4 centrales rhônalpines se trouvent désormais en zone orange, c’est à dire soumises à un risque sismique qualifié de « modéré », la centrale de Cruas-Meysse se situant même directement sur une faille.

Les 4 centrales rhônalpines ont entre 26 et 33 ans d’âge. « Tous les 10 ans l’exploitant doit améliorer son installation », souligne Grégoire Deyirmendjian. Ce n’est en effet que suite à une révision décennale complète que l’ASN renouvelle son autorisation d’exploitation. « Malgré leur vieillissement, elles résistent encore », assure le responsable lyonnais.

Un discours qui ne convainc pas Xavier Rabilloud, porte-parole du réseau Sortir du nucléaire. « Le Japon est le pays le mieux équipé pour prévenir les risques liés aux séismes et leader dans les technologies de pointe », fait-il remarquer. « Il est impossible de construire des réacteurs nucléaires dont on peut garantir qu’ils résisteront aux séismes. » Le collectif publie sur sont site un document interne d’EDF daté du 25 octobre 2002, montrant les efforts déployés par l’électricien pour échapper à une remise à niveau de sa centrale du Bugey. Des travaux évalués alors à 1,9 milliards d’euros. Un document qui n’est toutefois plus d’actualité selon l’ASN, puisque la centrale subit actuellement son contrôle décennal. Une visite dont les conclusions ne seront cependant pas connues avant fin 2012.

« Après l’accident de Three Miles Island, on a dit : "c’est normal les Américains sont nuls". Puis, il y avait Tchernobyl, c’était normal aussi, les Russes sont nuls. Puis, maintenant ce sont les Japonais », ironise Paul Coste, président du groupe Europe Ecologie les Verts au Grand Lyon, qui rappelle qu’en 2006, la Suède était elle aussi passée tout près d’une catastrophe nucléaire.

En 1986, le gouvernement russe a fait évacuer une zone de 30 km autour de la centrale de Tchernobyl. Le même périmètre de sécurité a été défini par les autorités japonaises autour de celle de Fukushima n°1. Or, les installations du Bugey et de Saint Alban se trouvent chacune à 35 km de Lyon.

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Publié le : mardi 15 mars 2011, par Michael Augustin