La deuxième phase s’annonce insipide

Confluence 2 : la fin des fantaisies

« Il y a eu assez de fantaisies », a décrété Christine Binswanger, l’urbaniste en charge d’aménager la deuxième phase de la Confluence. Elle a présenté jeudi à la presse les premiers immeubles qui peupleront l’emprise de l’ancien marché-gare. Le résultat est décevant. Exit l’audace et les couleurs, bonjour monotonie et grisaille.

La Confluence, vous connaissez ? Ce sont le cube orange et le (futur) pavé vert signés Jakob + MacFarlane, les immeubles qui bordent la darse et leurs peaux métalliques bleue, verte, dorée, argentée, la réhabilitation réussie de la Sucrière et du bâtiment des douanes, le centre commercial quatre étoiles tout en ouvertures et coiffé d’un chapeau aérien et coloré. Un « laboratoire d’architecture contemporaine », selon l’avis même de son aménageur, la SPL Confluence. Un laboratoire ou se côtoient les grands de ce monde d’architecture : Winy Maas, Rudy Ricciotti, Jean-Paul Viguier et plein d’autres.

Confié au cabinet parisien Ruelle, l’aménagement audacieux de la Confluence 1, entre le cours Charlemagne et les rives de Saône, a permis de sortir de l’anonymat cet ancien quartier industriel de « derrière les voûtes », comme on disait à Lyon, à coups de gros titre de la presse nationale et internationale, spécialisée ou non. Au point d’évincer l’inévitable photo de Fourvière des articles traitant de la capitale des Gones.

Mais voilà, la phase 1 touche à sa fin (80% sont réalisés) et avec elle l’audace du maire. La Confluence 2, située de l’autre côté du cours Charlemagne, jusqu’à l’autoroute s’annonce comme le petit frère médiocre d’un enfant surdoué : morne et quelconque. Conçu par les Bâlois de l’agence Herzog & de Meuron, le nouveau quartier conjugue le blanc avec le gris et le béton avec... le béton. Les formes sont insignifiantes, les projets sans originalité ni intérêt (voir diaporama ci-dessous). En langage d’urbaniste, cela s’appelle « des volumétries simples avec des façades majoritairement minérales dans des teintes claires », mais ce n’est pas mieux.

Pire, dans une ville où le R+5 (rez de chaussée plus cinq étages) est la règle, le projet suisse signe le retour des (petites) tours. Non, pas un phare comme le Crayon à la Part-Dieu ou la Tour de la Duchère mais des bidules de 16 étages, tout juste en dessous des 50 mètres de hauteur pour ne pas être frappés par la règlementation, plus contraignante, des immeubles de grande hauteur (IGH). Pour désigner ce genre de chose, il parait que le terme « immeuble de belle hauteur » s’impose. En tout cas, il a été ressassé à l’envie lors de la présentation à la presse. Ces immeubles « de belle hauteur » mais pas d’apparence sont nécessaires, semble-t-il, pour pouvoir densifier le quartier et caser 420 000 m² de bâti sur les 35 hectares du projet. Pour comparaison, la première phase en compte presque autant (400 000 m²) mais sur un terrain plus vaste : 41 hectares.

Début du carnage

Ce jeudi 16 janvier a donc eu lieu le lancement du lot A3, comprenez le terrain entre la fin du quartier Sainte-Blandine et la future esplanade François Mitterrand, esplanade dont l’inauguration est d’ailleurs prévue en juin. Huit immeubles, en plus de la Halle aux fleurs - conservée - de l’ancien marché-gare, amassés sur un lopin de terre d’à peine 7700 m².

On y trouve un immeuble de bureaux dont le concepteur, le Suisse Christian Kerez, explique sans rire qu’il s’inspire des façades lyonnaises parce que ses colonnes sont plus épaisses en bas qu’en haut. Puis un autre, confié aux Lyonnais d’AFAA qui, pour un immeuble tertiaire, a au moins un peu d’allure avec sa coiffe futuriste. Les bâtiments d’habitation ne sont pas mieux. Les deux projets réalisés par Tatiana Bilbao, qui comme son nom n’indique pas, nous vient du Mexique, n’auraient pas dépareillé à Gerland. Le fameux immeuble « de belle hauteur », auquel l’îlot A3 n’échappe pas, conçu, on n’est jamais mieux servi que par soi-même, par Herzog & de Meuron, est une sorte d’ovni de 16 étages donc, d’une emprise plutôt carrée mais avec des excroissances arrondis comme on n’en fait plus depuis les années 70.

Seul bonne surprise dans cet océan de béton stérile, une petite bâtisse de deux étages, soit la même hauteur que la Halle aux fleurs (qui sera d’ailleurs transformée en gymnase), abritant une crèche et six appartements en duplex. Conçue en escaliers par l’Allemand Manuel Herz, elle rappelle une Halle Tony Garnier miniature, ce qui n’est pas un hasard, son concepteur se disant inspiré par le célèbre architecte lyonnais.

Les travaux doivent commencer au printemps 2015 pour une livraison en 2017 ou 2018, échéance qu’on espère la plus lointaine possible.

Publié le : vendredi 17 janvier 2014, par Tony Truand