Europe Écologie les Verts

Une coopérative politique qui veut gouverner

« Nous sommes passés du lanceur d’alerte sympathique à la force politique. Nous sommes un parti de gouvernement prêt à prendre ses responsabilités », a lancé Cécile Duflot, la nouvelle patronne d’Europe Ecologie les Verts, devant quelque 2000 militants enthousiastes, réunis au Centre des congrès de Lyon. « Notre ambition : porter un projet de gouvernement original, global, désirable, mais aussi un projet crédible, opérationnel et radical », précisé le dossier de presse.

Surfant sur leurs bons scores aux européennes (16,28%) et régionales (12,2%), les écolos avaient décidément le moral. Et ce n’était pas Daniel Cohn-Bendit qui allait contredire ses coéquipiers. Après avoir rappelé le résultat de la candidate écologiste Marina Silva aux présidentielles brésiliennes (19,33%), l’espoir lui vient surtout d’outre-rhin où les Verts font actuellement jeu égal dans les sondages avec le parti social-democrate. Mieux, dans le land de Bade-Wurtemberg (sud-ouest), qui renouvelle son parlement régional en 2011, le candidat écologiste, crédité de 32 à 36% arrive en tête des intentions de vote. « Winfried Kretschmann sera le prochain ministre-président », a-t-il pronostiqué, avant de préciser : « le Bade-Wurtemberg c’est l’Alsace puissance 10 », pour son ancrage à droite.

Pour arriver à faire aussi bien en France, les écologistes devront néanmoins chasser leurs vieux démons et mettre fin aux querelles internes. « L’unité est le socle sur lequel se basent toutes les victoires », a martelé Cécile Duflot dans son discours, avant de décréter que « dans cette salle, il n’y a plus de verts et de non-verts, il n’y a plus que des écologistes rassemblés. »

Des écologistes, qui se sont donc constitués en « premier parti politique coopératif de l’histoire », selon Cécile Duflot, où les adhérents côtoient des « coopérateurs ». Ces derniers peuvent participer à des « agoras », c’est à dire des groupes de réflexion, ont le droit de vote lors de débats thématiques, pourront être candidats aux élections, mais ne participeront pas à leur désignation. Un statut hybride donc, censée tenir compte de « la frilosité de certains vis-à-vis de l’engagement partisan » tout en étant « une passerelle vers l’engagement approfondi », souligne la patronne du mouvement.

Contre la croissance "kirésoutou"

Si le programme politique du nouveau mouvement ne sera pas ficelé avant juillet prochain, on peut néanmoins déjà en apercevoir les grands principes : « face au fantasme de la croissance "kirésoutou" » (dixit le dossier de presse), les écologistes prônent « la transformation écologique de la société ». « Nous travaillons sur les modalités du vivre ensemble, plutôt que de renforcer la course à la consommation. [...] Nous privilégions les technologies du présent aux méga/nano/bio-technologies censées être "du futur" », clament les écologistes. 5 groupes de réflexion seront créés pour travailler sur l’empreinte écologique, l’économie, le vivre ensemble, la démocratie et les relations transnationales. Leur but : permettre de diviser par 2 le chômage et la précarité en 5 ans et la production de gaz à effet de serre en 10 ans.

L’ambiance était donc au beau fixe au Centre des congrès de Lyon où standing ovations et pointes d’humour se succédaient. Monté sur scène sous les applaudissement d’une salle debout comme un seul homme, Daniel Cohn-Bendit a ainsi lancé aux militants : « A tous les angoissés qui depuis des jours m’envoient des textos en disant "Dany soit de bonne humeur" : je suis de bonne humeur ! ». Des propos pris au vol par Cécile Duflut qui lui répondait quelques instants plus tard sur la même estrade : « si pour cela il suffit de SMS, je propose qu’on organise un roulement pour lui en envoyer tous les jours. Je tiens son numéro de portable à disposition. »

Nicolas Hulot et le « vous »

« C’est la première fois que Nicolas Hulot assiste aux assises d’un parti », a souligné Jean-Vincent Placé, numéro 2 de feus les Verts. Nicolas Hulot était donc là, mais a tenu à garder ses distances. Arrivé seulement à 17h30 et reparti peut après son discours, il est ostensiblement resté assis quand tout le monde s’est levé pour applaudir l’intervention de Cécile Duflot.

Puis, au cours de sa prise de parole, il s’est constamment adressé à la salle à la deuxième personne du pluriel : « Vous avez une occasion unique de redonner de la noblesse à la politique » ou encore « J’espère que vous ne soyez pas une vulgaire offre supplémentaire ». D’autant plus remarqué, et applaudi, fut donc son lapsus alors qu’il évoquait la mutation écologique de la société. « Ce ne sera pas en restant en circuit fermé que nous y parviendrons, enfin que vous y parviendrez », a-t-il lancé provoquant des « Nicolas avec nous ! », dans une salle déchaînée.

Les présences de Nicolas Hulot mais aussi d’Antoine Waechter (Mouvement écologiste indépendant) ont donc éclipsé l’absence de Corinne Lepage (Cap 21) et de Génération Ecologie. « Les portes sont ouvertes », leur a lancé Cécile Duflot, visiblement satisfaite du lancement réussi de cette nouvelle force politique, qui a pris soin d’afficher son unité, mais pour laquelle l’épreuve de feu ne fait que commencer.

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Publié le : dimanche 14 novembre 2010, par Michael Augustin