Après le Biennale de Venise en 1999 et la Documenta de Kassel en 1992, Michel François investit pendant 2 mois l’Institut d’art contemporain à Villeurbanne, sous forme d’une monographie. Ainsi, tout l’espace d’exposition est dédié à l’artiste. « L’exposition est en soi une œuvre », commente Nathalie Ergino, directrice de l’institut. Michel François s’appuie sur l’agencement des salles en forme de T pour jouer sur la symétrie, l’un de ses thèmes favoris. Ainsi, chaque pièce renvoie à une autre, à l’opposé du musée, sans pour autant en créer une copie conforme. Ainsi l’œuvre Pièce Détachée, sorte de stabile composée de tubes en acier, maintenus par la seule force magnétique, une œuvre très statique, trouve son reflet dans l’installation Scribble (gribouillage en français) un ensemble anarchique de courbes dessinées dans l’espace, tout en mouvement, comme des lignes griffonnées au hasard sur une feuille.
L’autre fil conducteur, le recyclage. Rien ne se perd, tout se transforme, semble être la maxime de l’artiste. « Je suis en continuelle revisite de mon corpus de travail », explique le sculpteur sa démarche. Ici non plus, revisite ne veut pas dire plagiat, mais plutôt nouvelle approche. Michel François met à jour un vieux concept en utilisant par exemple de nouveaux matériaux. Exemple, l’installation Retenue d’eau, une grappe de sacs remplis d’eau, accrochée au plafond, créée en 1998. Six ans plus tard, l’œuvre Souffles dans le Verre (noirs) voit le jour : une grappe de gouttes en verre noir, également suspendue au plafond.
Ailleurs, Michel François joue avec les symboles, pour mieux se moquer d’eux. Ainsi, l’aigle impérial des États Unis, habituellement en marbre pour représenter la puissance de l’État, a été recréé en encre glacée qui fond à vue d’œil. Chaque jour une nouvelle sculpture sera plantée dans un jardin rempli de poudre de marbre blanc. La puissance se désintègre et devient poussière, semble être le message envoyé par l’artiste.
Pièce atypique dans une exposition très rangée au point de paraître maniaque : l’Atelier. Sorte de pot-pourri, témoignant de la perpétuelle recherche de sens menée par l’artiste. Qui joue, ici aussi, souvent sur les contrastes : ballon gonflé, ballon flasque. Pièce brute, pièce travaillée. Ventre plat, ventre rebondie de femme enceinte. Le thème de la grossesse fascine l’artiste : « Quand on regarde le ventre d’une femme enceinte, on voit la surface qui gonfle mais on ne peut regarder à l’intérieur. » Cette frustration a donné lieu à une sorte de roman photo, où Michel François imagine à sa façon ce que peut bien se trouver de l’autre côté du ventre rebondi.
L’Atelier renferme également quelques pépites, comme l’arbre à chips, créé par un procédé original, la chips perdue. A l’instar de la technique de la cire perdue. Un moule en plâtre est formé autour d’une chips, puis rempli de cuivre liquide. Le cuivre brule la chips et prend sa place. Renouvelé un grand nombre de fois, le procédé crée une quantité de chips en cuivre que l’artiste a accroché, telles des feuilles, à un arbre en fil de fer. Un peu plus loin, des poches de vêtement, rempli de plâtres, signifient "le temps passé en atelier à rien faire", les mains dans les poches.
Infos : Institut d’art contemporain, 11 rue Docteur Dolard, Villeurbanne, 04 78 03 47 00, www.i-art-c.org. Du 12 mars au 9 mai, du mercredi au dimanche, de 13h à 19h. Visites guidées : samedi et dimanche à 15h. Tarifs : 4 € (plein), 2,50 € (réduit).