Michael Levine a conçu, pour ce Parsifal, des décors grandioses : terre craquelée traversée par une rivière de lave, lune énorme, immenses murs de roche noire, ciel rouge, effet miroir, plan d’eau, il fallait bien cela pour servir Wagner, le monumental. Une mise en scène à la fois sobre et symbolique de François Girard, des costumes modernes et classiques : pantalon noir et chemise blanche pour les hommes, robe noire, bas noir et escarpins noirs pour les femmes, complétée par un voile noir à la Jackie Kennedy ou à la manière des pleureuses grecques, c’est selon... Des voix célestes et une direction musicale parfaite de Kazushi Ono, comme toujours.
Une œuvre mystique…
Ultime partition de Richard Wagner, Parsifal a été créé en 1882 au festival de Bayreuth. Wagner a lui-même qualifié cet opéra de « festival scénique sacré en trois actes ». De fait, l’histoire se déroule à Montsalvat, le domaine des chevaliers qui veillent sur deux reliques sacrées du Christ : le Graal, coupe qu’il a utilisée pour son dernier repas avec les apôtres, et la Lance sacrée, celle de l’officier romain qui transperça son flanc. Amfortas, roi-prêtre de Montsalvat, souffre d’une inguérissable blessure depuis qu’il a perdu la Lance en défiant le magicien Klingsor.
Tant que le Graal et la Lance ne seront pas réunis, Montsalvat vivra dans l’incomplétude, Amfortas dans la souffrance, sa blessure ne s’arrêtera pas de saigner. Or une prophétie céleste a annoncé que la Lance ne serait reprise que par un innocent, un pur. Ce sera Parsifal l’ignorant, Parsifal, le « pur si fou », un enfant presque. Il surmonte les épreuves et les sortilèges du jardin de Klingsor. Il résiste au désir et aux séductions de Kundry, celle qui a ri en voyant jadis le Christ sur son chemin de croix dans les rues de Jérusalem ; Kundry condamnée mais pas damnée, qui trouvera, comme Amfortas, l’apaisement au bout de la quête qui fait de Parsifal le nouveau roi.
… et contemporaine
François Girard a souhaité, à travers sa mise en scène, faire comprendre la dimension contemporaine de l’œuvre de Wagner : « La déchéance que nous montre la société du Graal, c’est notre propre fin du monde, engoncé dans le problème de nourrir une population en croissance galopante, terrorisé par le réchauffement de la planète. L’opéra nous parle de notre propre apocalypse. Je ne suis pas habité par un parti-pris d’actualisation mais je veux que ce Parsifal soit autre chose qu’une belle réplique de 1882 », explique-t-il. Au public de dire si cette intention a été entendue.
Créé à l’Opéra de Lyon, Parsifal sera ensuite repris par ses deux coproducteurs, le Metropolitan Opera de New York et la Canadian Opera Company de Toronto.