« Tous les ans pour les Journées européennes du patrimoine, on se demande comment élargir les publics. La visite augmentée du Grenier d’abondance n’est pas un gadget. C’est une juste jonction entre la création et le patrimoine », explique Jean-François Marguerin, directeur de la DRAC Rhône-Alpes. Cette bâtisse du début du XVIIIe siècle, qui abrite les locaux de la DRAC, a été érigée à la lisière des remparts de la Croix-Rousse, coté Saône.
Réalisé par l’artiste Diego Ortiz, le dispositif avait déjà été expérimenté à Marseille. « L’idée est de transformer le monument en quelques choses d’un peu mystérieux. […] L’expérience permet de percevoir la présence de personnes qui ne sont pas là et d’entendre ce qui a pu se passer dans les lieux. Le résultat dépend du niveau d’implication de chacun à vouloir croire l’enregistrement », précise le concepteur d’origine colombienne. « On ne raconte pas une histoire dans un lieu mais on invite les gens à jouer avec le lieu dans un aller-retour entre la vidéo et le réel. »
Répondant au nom quelque peu sibyllin de Discrepances, le dispositif n’est pas réservé au public branché sur les nouvelles technologies. Titillant la curiosité, la visite invite à un voyage dans le temps. Équipé d’un casque et d’une tablette tactile, le visiteur démarre son parcours au pied de l’escalier en pierre du Grenier d’abondance. Une mystérieuse jeune femme évoque les soldats qui jadis transportaient des sacs de blé de cet ancien grenier à grain. Puis elle convie les visiteurs dans les étages vers des couloirs inconnus de la DRAC.
Inspiré par l’artiste canadienne Janet Cardiff, Diego Ortiz questionne le rapport à la réalité. « Je cherche à créer des expériences avec les nouvelles technologies, à éclater le rapport au cinéma, à notre environnement et à la mobilité. Ici ce qui est important c’est le son qui vient de l’hors-champ. On est réellement immergé dans l’histoire racontée ». Le son circule en effet à 360° comme dans la réalité. Cette bande sonore minimaliste signée Antoine Gonot, accentue l’étrangeté de la visite. Le parcours relève ainsi plus de l’expérience sensorielle que d’une réelle visite guidée. Sur une quinzaine de minutes de balade, la majeure partie est consacrée à l’imaginaire. Pour le visiteur qui voudrait en apprendre sur l’histoire du Grenier d’abondance, il faudra voir ailleurs. Pour s’étonner et s’émouvoir, c’est ici.
Coordonné par l’association lyonnaise AADN (Association pour le développement des arts et cultures numériques), le projet a été réalisé cet été avec un budget de 10 000 euros. L’équipe a été accueillie en résidence pendant sept jours dans les murs de la DRAC. Certaines séquences ont été tournées avec la complicité des salariés de l’institution et des danseurs du Conservatoire national supérieur musique et danse (CNSDM).
Info : Grenier d’abondance, 6 quai Saint Vincent, Lyon 1er. Horaires : samedi et dimanche, de 10h à 18h