« Je pense donc je gène », « 1789 ou 1984 ? Faites votre choix » ou encore « Non à la censure », pouvait-on lire sur les nombreuses pancartes. Les manifestants, jeunes pour la plupart, ont été mobilisés via internet, surtout les réseaux sociaux, et par le bouche à oreille. Souvent vêtus de noir, beaucoup portaient le masque à la barbichette de Guy Fawkes, un activiste britannique du 17ème siècle, devenu l’emblème des cyberactivistes.
Acta, pour Anti-Counterfeiting Trade Agreement, est un traité international destiné à lutter contre la contrefaçon. L’accord, signé par 22 pays de l’UE, les États-Unis et le Japon fin janvier, est dépeint par ses opposants comme une atteinte grave à la liberté d’expression et aux droits des utilisateurs sur Internet.
Entre autres mesures décriées, Acta prévoit d’imposer aux fournisseurs d’accès de fournir, non pas aux autorités ou à la justice mais directement aux ayant-droits, toute information permettant d’identifier l’auteur d’un acte de contrefaçon sur Internet. De ce fait, les opposants au projet redoutent une restriction des libertés individuelles, ainsi que des atteintes à la vie privée réalisées au nom de la défense de la propriété intellectuelle.
Quant aux médicaments, « un simple suspicion de contrefaçon suffirait à une firme pharmaceutique pour demander aux douanes de saisir voire de détruire des médicaments génériques », explique l’eurodéputée Sandrine Bélier. « Le risque, mettre en danger la vie de millions de personnes en réduisant l’accès aux médicaments. »
Fanny Dubot, secrétaire fédérale des Jeunes écologistes, le seul groupe politique identifiable dans le cortège, s’inquiète surtout de la « confidentialité » dans laquelle l’accord a été signé. « Il n’y a pas eu de débat. » Dans un tract, les Verts dénoncent « une logique répressive, dictée par les industries de la recherche et du divertissement ». Concluant : « Acta est un cheval de Troie qui organise le contrôle de l’Internet dans l’intérêt d’une poignée de multinationales. »
Les écologistes viennent d’être rejoints par François Hollande. « Nous interpellons le gouvernement pour l’alerter sur les enjeux démocratiques qui sont en cause, et appelons au refus de sa ratification par le Parlement européen », a écrit le candidat socialiste dans un communiqué publié vendredi soir.
En Allemagne, où entre 3000 (Francfort) et 16 000 (Munich) personnes ont battu le pavé par des températures parfois sibériennes, la ministre de la justice, Sabine Leutheusser-Schnarrenberger a déclaré : « Nous ne voulons pas qu’il soit possible de bloquer l’accès à Internet à cause de violations du droit d’auteur. Les fournisseurs d’accès à Internet ne sont pas des auxiliaires de police ».
Le gouvernement fédéral rejoint ainsi la position de la Pologne, la République tchèque et la Lettonie qui ont également pris leurs distances avec le texte.
Les photos de la manifestation sont sur : www.flickr.com/lyoninfo