Pelléas et Mélisande rappelle le mythe de Tristan et Yseult : deux jeunes gens, irrésistiblement amoureux, ne peuvent s’aimer car la jeune fille est mariée à un vieil homme jaloux (Golaud). Ils en perdront la vie.
Un opéra hermétique
La comparaison entre les deux opéras s’arrête là, car Pelléas et Mélisande est, à la décharge de Christophe Honoré, infiniment plus compliqué à mettre en scène que Tristan et Yseult. Le livret est de Maurice Maeterlinck, d’après sa pièce de théâtre éponyme. Il s’agit d’un drame lyrique en cinq actes et douze tableaux, hautement symbolique. La musique de Claude Debussy, volontairement anti-mélodique, s’accorde parfaitement à l’univers onirique de Maeterlinck. Un parti pris qui a dérouté le public dès l’origine. La première de Pelléas et Mélisande, le 30 avril 1902 à l’Opéra-Comique à Paris, fut en effet chahutée. Ainsi, au second tableau du deuxième acte, lorsque Mélisande s’écria : « Je ne suis pas heureuse ! », le public lui répondit : « Nous non plus ! ».
Une mise en scène moderne mais qui dessert le texte
La mise en scène de Christophe Honoré, qui situe l’action dans un décor d’Europe de l’Est, avec jaguars, entrepôts, béton, ruelles, fourrure, perruques et lunettes de soleil, plonge dans un univers de mafia et de prostitution en total décalage avec le texte, le ridiculisant même parfois. Comme dans la scène de la chevelure (acte 3 scène 1), inspirée du célèbre poème éponyme de Baudelaire ou encore de celui de Stéphane Mallarmé (Tristesse d’été, 1866), pour lequel Maeterlinck éprouvait la plus vive admiration. Dans le livret, Mélisande, accoudée à la fenêtre d’une des tours du château, peigne ses cheveux et chante : « Mes longs cheveux descendent/Jusqu’au seuil de la tour ». Chez Christophe Honoré point de tour, mais une jaguar sur le toit de laquelle grimpe Mélisande…
Le personnage de Mélisande avili
Mélisande est un personnage mystérieux. Golaud la rencontre pour la première fois dans la forêt, venue de nulle part, seule et effrayée. Debussy se plaisait à penser qu’elle serait la dernière femme, enfuie, de Barbe-Bleue, séductrice et ambiguë. Alors pourquoi la travestir en prostituée d’Europe de l’Est ? Pourquoi avilir la partie sauvage, mystérieuse que toute femme porte en elle ?
Beauté des voix
Heureusement, les voix sont toutes d’une très grande qualité : celle, profonde, du basse Jérôme Varnier (le vieux roi Arkel ) ; celle, toute en nuance, du séduisant ténor Bernard Richter (Pelléas) ; celle, émouvante, de la gracieuse soprano Hélène Guilmette (Mélisande) ; celle, chaleureuse, de la mezzo-soprano Sylvie Brunet-Grupposo (Geneviève, la mère de Golaud et de Pelléas) ; et enfin, celle, pure et perçante, du jeune Cléobule Perrot (Yniold, le fils de Golaud).
Cet opéra s’avère ainsi en tout point contraire au précédent spectacle de l’Opéra de Lyon, le Carmen d’Olivier Py, où tout était un régal, sauf les voix…
Info : jusqu’au 22 juin 2015. Billeterie : +33 (0)4 69 85 54 54