« Je suis étonnée qu’on passe si tard », commente Michèle Picard, la maire de Vénissieux. L’année dernière, ce même procès a eu lieu début avril. Malgré les échecs de ses précédentes tentatives, elle assure ne pas être là pour « accomplir une formalité ». « Je viens pour alerter, pour montrer ce qui se passe », affirme l’élue.
A la barre, elle n’a cesse d’invoquer l’ordre public, menacé selon elle, par les expulsions. Force d’exemples, elle évoque les cas de cette Vénissiane qui a menacé de se jeter de son balcon, de cette mère de 6 enfants qui s’est immolée dans le hall de la mairie de Saint-Denis ou encore de Roger, SDF, mort dans l’incendie de son appartement, éclairé à la bougie faute d’électricité.
« Il y a bien là, trouble à l’ordre public. Il y a bien là, non assistance à personne en danger », s’écrie Michèle Picard, évoquant le pouvoir de police du maire. « Cela relève pleinement de ma compétence. » Son intervention, longuement applaudie par la petite centaine de soutiens qui ont fait le déplacement, se veut une réponse aux griefs relevés par la préfecture. Celle-ci estime justement que les maires sortent de leur rôle en signant de tels arrêtés.
« Nous parlons d’hommes et de femmes qui vivent dans des conditions d’extrême pauvreté et de détresse », complète Bernard Genin, son homologue de Vaulx-en-Velin. « Si la situation n’évolue pas, à Vaulx-en-Velin nous continuerons à signer de tels arrêtés, qui sont des actes de résistance ! »
Sur un plan plus juridique, Me Gilles Chatelier rappelle qu’il s’agit de « mesures ciblées et non d’une interdiction générale », citant un arrêt du Conseil d’État de 2010, qui permet aux autorités d’intervenir en cas d’« atteinte à la dignité humaine ».
Ces arguments seront-ils suffisant pour convaincre le juge, ce qui constituerait alors une première ? « Ce n’est pas l’applaudimètre qui va déterminer le sens de ma décision », a prévenu Éric Kolbert, le président du tribunal. Réponse lundi 30 avril.