La mesure s’avère sans surprise peu appréciée des fêtards : « On nous met constamment des bâtons dans les roues. On ne peut plus faire la fête et profiter d’une soirée, entre cette interdiction et la fermeture des bars à 1h du matin », s’agace Mathieu, un jeune homme de 20 ans, habitué des Berges du Rhône. D’autant plus que l’efficacité de l’interdiction ne semble pas évidente : « Elle ne sert à rien ! », s’écrie Sonia, une Lyonnaise de 19 ans. « Soit on s’adapte et on va acheter de l’alcool avant 22h, soit on va dans les épiceries du coin, qui n’ont aucun scrupule à nous en vendre, même après 22h, mais à des prix très élevés. »
L’info a fait la une de tous les journaux lyonnais et même nationaux : le Progrès parle de « mauvais coup porté aux magasins des oublis », tandis que 20 Minutes souligne la « colère des commerçants ». A croire que les journalistes ne sont pas très fêtards, car cette interdiction existe déjà depuis plus de trois ans. Un arrêté préfectoral datant du 1er avril 2008 imposait déjà la même restriction sur la quasi totalité de la ville. Seuls le 4ème et le 6ème arrondissements étaient jusqu’alors épargnés, des quartiers où les magasins ouverts après 20h sont de toute façon quasi-inexistants. Une mesure qui était toutefois passée inaperçue chez certains, comme Capucine, 20 ans : « Je pars toujours en retard pour les soirées, alors il faudra que je fasse attention maintenant de ne pas partir trop tard et de m’approvisionner avant 22h », s’inquiète la jeune fêtarde.
Pas forcément, car les techniques de contournement sont déjà connues de tous. Certes, les épiciers se disent tous fortement embêtés par la restriction : « Ça fait du mal aux affaires. On a besoin de la vente d’alcool pour vivre », déclare ainsi un des commerçants d’une épicerie vers Saxe-Gambetta, ouverte 24h/24. Pourtant, il a trouvé l’astuce : « On a nos techniques et on fait gaffe aux flics, qui passent souvent ». Ses solutions ? Demander des prix exorbitants pour compenser le risque d’amende et renflouer les caisses en raison du manque à gagner. Ainsi une bouteille lambda, vendue 3 euros dans un Monoprix, s’affiche ici à 6,20 euros. Une façon maligne de profiter pleinement de la situation.
Les fêtards ne sont d’ailleurs pas dupes : « Cet arrêté donne juste une raison de plus aux épiciers d’augmenter leurs prix et de se faire plus d’argent », s’exclame Margot, étudiante de 19 ans. « Cette interdiction traduit un réflexe très français : légiférer à outrance pour montrer que “les choses changent” », affirme Romain, 20 ans. « Et nos libertés alors ? Où sont-elles ? » s’exclame Mathieu. Inefficace, l’arrêté alimente au moins les débats dans les soirées.