Situé dans le quartier d’affaires de Francfort, seconde place financière d’Europe, le film est librement inspiré d’un récit biblique, celui du roi David et de Bethsabée : le premier conquiert la seconde en envoyant son mari à la guerre. D’un point de départ assez banal mêlant adultère, sexe et pouvoir, le réalisateur Christoph Hochhäusler, qui signe ici son troisième long-métrage, tire une œuvre froide et déconcertante.
Ses protagonistes sont à l’image de cette ville, filmée comme un no man’s land de verre et de métal. Des êtres déshumanisés et aseptisés. Roland, le banquier tout puissant est un homme las, mou même par moments, obligé de s’inventer une réalité imaginaire, de se shooter au malheur des autres pour se cacher qu’il ne maîtrise plus grand chose. Svenja, quant à elle, étouffe dans sa vie de femme de banquier aux aspirations petit-bourgeoises. Ils parlent peu, leur relation est sans cris ni larmes, sans complicité. Leur attirance semble le fruit d’une fatalité, bien plus que d’une passion.
L’opacité de Svenja et Roland tranche avec la transparence des lieux dans lesquels ils évoluent. Le monde de la banque de Christoph Hochhäusler vit et travaille dans des bâtiments en verre. « Le verre peut créer des illusions d’optique », explique le réalisateur. « Le monde semble à portée de main, main en fait, il est hors d’atteinte. » Énigmatique, son film lance sans cesse des pistes, qu’il n’explore que rarement. La drogue, la déchéance humaine, l’illusion de l’imaginaire jusqu’à la révolte sociale : « la crise va descendre dans la rue », dit Christoph Hochhäusler. Dans Sous toi, la ville, tout est effleuré, rien n’est exploré.
Reste la qualité visuelle du film, froide et léchée, intercoupée par de furtifs et bizarres gros plans, posée sur une musique dissonante et angoissante, pour mettre à nu (au sens propre comme figuré) la violence insidieuse de l’univers ouaté de la finance. Tout en rétention, le film, qui a été projeté dans la sélection Un certain regard à Cannes, peine toutefois à faire ressentir la tragédie qu’il ambitionne de dénoncer. Et laisse un goût d’inachevé.
Long-métrage allemand
Réalisé par Christoph Hochhäusler
Avec Robert Hunger-Buhler, Nicolette Krebitz, Mark Waschke,
Durée : 1h50
Site officiel : www.soustoilaville-lefilm.com
Sortie : 15 décembre