De 1902 à 1998, on y fabriquait des utilitaires sous la marque Berliet, puis Renault Véhicules Industriels (RVI). Depuis 2002, des collectifs de toutes sortes occupent les hangars de la rue Lacassagne. Organisés en collectif autogéré, ils y dansent, jouent, sculptent..., et vivent.
Comme d’habitude, la bataille des chiffres fait rage. La municipalité estime à 120 le nombre d’occupants, en ne comptant que ceux qui ont déposé un projet artistique à la mairie. Les artistes, eux, affirment être beaucoup plus nombreux, environ 400. Même la surface de l’immeuble fait débat. 18 000 m² dit la mairie, le double estiment ses occupants.
Évoquée depuis près de deux ans, la relocalisation des artistes, s’est soudainement précisée début juin. Lors d’une conférence de presse à la Mairie du 3ème, les adjoints à la Culture et à l’Urbanisme de Lyon et le maire du 3ème ont annoncé que les occupants devaient quitter les lieux d’ici le 31 juillet pour laisser place à un « projet urbain d’intérêt général ».
Début 2008, Gérard Collomb avait annoncé que les hangars industriels devaient céder la place à une extension de la SEPR (Société d’enseignement professionnel du Rhône), qui occupe déjà la partie sud du tènement. Une bibliothèque, un gymnase, un espace vert de 6000 m², des logements étudiants et des lofts d’artistes devront aussi être créés. Les élus expliquent ce soudain empressement par la vétusté du site, l’amiante, les risques d’accidents ou encore le mécontentement des voisins.
En 2008, Gérard Collomb s’était engagé que le « projet d’aménagement ne démarrera qu’un fois que des solutions de relocalisation [des] projets auront été trouvées. » Sur le papier le maire de Lyon a tenu promesse, en dénichant le bâtiment Lamartine, une ancienne usine mise aux normes, à côté du stade Marc-Vivien Foé, toujours dans le 3ème arrondissement. Une solution encore une fois précaire, puisque le site devrait, à terme, céder sa place à une extension du terrain de foot voisin. Principal souci, il ne mesure que 3500 m², soit beaucoup moins que le friche. Et, il ne sera disponible qu’en septembre ou octobre prochains. « Qu’est-ce qu’on fait de notre matos ? On va répéter où ? », s’écrie Messaline, une comédienne-danseuse qui vient répéter à la friche 1 à 2 fois par semaine. « On a des planchers, camions, décors, costumes... ». Réponse vague de la mairie qui affirme chercher une solution pour entreposer le matériel. Pour le reste, l’adjoint à la Culture Georges Képénékian assure « poursuivre la recherche de nouveaux lieux complémentaires de cet espace » et évoque Tarare ou la vallée du Giers, où les élus souhaiteraient accueillir des artistes. Là non plus, rien de concret n’a été annoncé.
En plus de leurs locaux de travail, les artistes entendent défendre « un lieu de création libre et alternatif, un multi croisement de points de vue sur l’art et la vie, un laboratoire de la société civile ». « Nous ne voulons pas être rentables et, en cela, nous ne pouvons en aucun cas satisfaire les ambitions individuelles des acteurs de cette politique », écrivent-ils sur un blog. « On assiste à une marchandisation de l’art », déplore aussi Messaline. « Nous sommes contre cette politique mercantile. » Elle prévient : « On n’a pas envie de partir. On sera là le 31 juillet. Et le 1er août aussi. »