« De la harissa dans le combat politique »

Iconoclaste, décalé, inclassable, le candidat MoDem l’est tout à la fois. Il aime et assume. Mieux, il le revendique. Comme lorsqu’il réclame des « stages dans des kébabs pour les jeunes du boulevard des Brotteaux ». En échange, les jeunes des quartiers défavorisés auront accès à des formations dans les grandes sociétés partenaires de la Région, grâce à un pass entreprise. Afin de proposer des opportunités « aux niaqueurs, aux dérouilleurs qui refusent de rouiller dans leurs cités. »

La cible de la campagne de l’ancien ministre à l’égalité des chances, ce sont décidément les défavorisés. C’est pour eux qu’il promet une région Rhône-Alpes à égalité des chances, son slogan de campagne. C’est pour eux qu’il questionne l’« éco-conditionalité des aides » prônée par Europe Écologie (c’est à dire le versement d’aides sous condition de bonne conduite écologique et sociale). « Comment va faire le type qui crée un resto avec quelques milliers d’euros s’il ne peut pas respecter les critères écologiques », s’interroge le candidat.

Mais le principal problème pour Azouz Begag, c’est la méconnaissance de la Région. D’ailleurs, selon si Jean-Jack Queyranne est présent ou pas, c’est soit la région soit son président qui n’est connu que de 20% des Rhônalpins. « Ce n’est pas un déficit de notoriété, mais un déficit démocratique », s’écrie l’ex-ministre. Pour lui, tous les outils mis en place ne servent à rien si les Rhônalpins les ignorent. Et de s’interroger sur le profil social des étudiants qui profitent d’une bourse de la Région. Sous-entendu : que des gosses de riches. Pour que cela change, le candidat orangiste veut faire élire un délégué régional dans chaque classe de lycée « pour propager la bonne nouvelle ».

Une banque du tutorat devra mettre en relation ainés et jeunes créateurs d’entreprise pour les aider à démarrer leur projet. Pour lutter contre le désert médical dans nombre de territoires, il propose de verser des bourses aux étudiants en médecine qui s’engagent à s’installer pendant 10 ans dans une zone dans le besoin. Puis, afin d’aider les jeunes à se loger, la Région se portera caution auprès des bailleurs.

Peu fortuné, le MoDem va mener campagne à l’ancienne pour faire connaître son programme. « Nous allons récréer l’agora », explique Lionel Boucher, le directeur de campagne. Concrètement, Azouz Begag va haranguer les foules du haut d’un tabouret. Rendez-vous à Bellecour le 22 février entre midi et deux. Les cités ne seront pas oubliées pour autant. « Il y 40 Zones urbaines sensibles (ZUS) en Rhône-Alpes. Il n’y aura pas un déplacement sans visite d’une ZUS », promet Lionel Boucher. Et tant pis si les tracts n’arrivent que dans une semaine.

Quid des alliances du deuxième tour face à l’opposition farouche des Écologistes et du Front de gauche de négocier avec le MoDem, considéré comme un parti libéral ? « Ils sont trop chauds avec nous », feint de se plaindre le candidat. Et de s’interroger : « c’est quoi d’être libéral ? Le type qui crée son Kébab, c’est un capitaliste, puisqu’il veut gagner de l’argent. » Pour Azouz Begag, les méchants ne sont pas ceux qu’on croit. « Quand on est président de région et on cumule les mandats, on est bon ou méchant ? »

Justement, la question du cumul. « La politique doit être un sacerdoce », clame le candidat, alors qu’il y a sur sa liste nombre de candidats qui détiennent des mandats électifs municipaux ou communautaires. Interrogé, Begag élude la question. Le problème n’est finalement pas le cumul des mandats mais celui des indemnités. Celui-ci étant de toute façon limité par la loi, il promet d’en discuter avec ses colistiers.

Les militants, présents nombreux dans la salle ne semblaient pas convaincus. « Une campagne décalée c’est bien, mais il faut quand même aller sur les marchés », soupire un élu villeurbannais. « Il faut qu’on se bouge, sinon ça ne donnera rien », renchérit une candidate de l’Ouest lyonnais. Azouz Begag, lui, reste convaincu qu’il créera la surprise.