Rendez-vous est donné ce dimanche à la passerelle Saint-Georges. Une cinquantaine de bénévoles sont sur le pied de guerre, armés de cordes, d’aimants et de grappins, des crochets à trois piques. L’opération démarre par un point sécurité. Le jeune homme qui s’y colle se prénomme Cédric, mais se fait appeler Otto, parce que des Cédric, il y en a tellement. Ingénieur dans une entreprise de maitrise d’ouvrage, la sécurité chantier, il en connait un rayon. « Je vais vous marcher sur les pieds. Si ça fait mal, c’est que vous n’avez pas de chaussures de sécurité », lance-t-il. Comme les baskets et autres chaussures de randonnées sont largement majoritaires, il renonce au test et préfère insister sur les autres consignes : ne pas poser les grappins par terre pour éviter de marcher sur les pointes acérées de l’outil, assurer ses arrières quand on tire sur la corde pour ne pas renverser un autre bénévole ou tomber sur la chaussée. Avant de demander si tous les participants sont à jour pour leur vaccin contre le tétanos.
Puis, le bataillon de nettoyeurs se met en marche vers la place Antonin Poncet. En contrebas de l’arbre à fleurs, l’association a repéré de nombreux objets abandonnés dans le Rhône. « Nous utilisons Mapstr pour noter ce que nous apercevons dans l’eau », explique Pierre, l’un des deux fondateurs de Nettoyons Lyon. Cet outil de cartographie leur permet de partager leurs trouvailles et d’organiser leurs sorties. Sur la carte, les nombreux points donnent une idée de l’étendu du chantier.
Photographe amateur, Pierre partage cette passion avec Nicolas, l’autre cofondateur de l’association. Au cours d’une balade, ils ont fait la connaissance de Maximilian qui leur a parlé des opérations de nettoyage qu’il menait parfois en solitaire. L’idée a fait mouche et les deux comparses se décident de se lancer dans cette nouvelle activité. Quitte à délaisser un peu la photographie. En à peine quatre semaines, ils ont réussi à organiser presque une sortie de nettoyage par jour et en même temps de se constituer en association, avec un conseil d’administration d’une quinzaine de personnes. Un compte Instagram et une page Facebook ont fait le reste pour se faire connaitre et attirer de plus en plus de bénévoles, prêts à donner un coup de main pour dépolluer les fleuves. « Les gens ont ressenti un vrai besoin de s’investir », se félicite Nicolas. « On leur apporte un côté ludique. »
Avoir un vrai impact
Alexandra est l’une d’eux. Cette ancienne commerciale en informatique est venue pour « avoir un impact pour l’environnement ». De retour d’un voyage de six mois à travers cinq pays d’Asie du Sud-Est, elle a été sensibilisée aux ravages de la pollution lors d’un séjour aux Philippines. « Le récif corallien est très abimé là-bas », se désole la jeune femme. Bloquée sur place à cause de la Covid, elle a joint le geste à la parole et est partie en plongée nettoyer le fond de mer. « On habite une si belle planète et on s’en sert de poubelle », s’indigne celle qui se cherche désormais une nouvelle voie dans l’écologie.
Hélène et Mathieu sont, eux, venus en famille, accompagnés de leur filles Othilie (10 ans) et Romane (5 ans). « J’espère qu’on trouvera un vélo dans l’eau. On leur a vendu la sortie comme ça », rigole la maman. Mathieu s’était acheté un aimant et une corde il y a deux ans déjà mais trouvait « un peu couillon » de partir seul à la pêche aux déchets.
Des vélos, il y en avait deux dans l’eau ce dimanche, un peu recouverts de vase mais à première vue encore fonctionnels. De nombreux objets sont en effet encore utilisables ou, au moins, transformables comme cette quantité de casques moto dont Nicolas aimerait faire des pots de fleurs. Si bien que l’association cherche désormais un lieu de stockage pour entreposer tous les objets qui peuvent encore servir. « On a repéré une moto ancienne qu’on remontera dès qu’on aura trouvé un local », précise le cofondateur, avant de faire l’inventaire d’autres prises plus insolites : menottes, microscope, frigo et même une arme à feu ancienne qu’il a remise à la police.
La police état aussi de sortie ce dimanche. D’abord la municipale, intriguée par le remue-ménage sur le pont de la Guillotière, où une poignée de bénévoles s’affairait au bout d’une très longue corde pour essayer de déloger un aimant accroché sous le quai du bas-port (photo). Les trois agents sont vite repartis, rassurés par le côté bon enfant de l’opération. Puis, comme l’aimant refusait de céder, c’est finalement la police fluviale qui a donné un coup de main à bord de leur zodiac.
Pour Pierre et Nicolas, il s’agit désormais de structurer l’association en créant différents pôles : communication, animation, graphisme etc. Dans le but de bientôt proposer aux petits et grands des ateliers de sensibilisation aux enjeux écologiques. Et d’instaurer une vraie régularité avec des sorties tous les mercredis, samedis et dimanches. Avis aux amateurs.
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