Les tribus de Lyon - épisode 11

Vive Le Roy !

Contre toute attente, le Comte de Paris, descendant de Philippe d’Orléans et prétendant légitime au trône, bénéficie de quelques soutiens pour recevoir la Couronne de France. « Le Centre Royaliste de l’Action Française est le principal mouvement monarchiste français », explique Stéphane Blanchonnet, Président de section de Lyon.

L’Action Française est née en 1898, au moment de l’affaire Dreyfus, sous l’impulsion de Maurice Pujo. Aujourd’hui, c’est une petite structure, qui compte une vingtaine de militants actifs à Lyon et pas plus de cinq cents en France, dont le profil est varié. Deux fois par mois, le journal Action Française 2000 relate l’actualité pour environ deux cents abonnés dans le Rhône. La petite taille de la formation les empêche d’avoir une grande visibilité dans Lyon, malgré le tractage et les affiches placardées sur les murs de la ville.

Un petit goût d’Antan
Leur militantisme prend tout de même des formes originales, notamment par des démonstrations festives et commémoratives, comme la Fête de Jeanne d’Arc. La nostalgie est au rendez-vous, par la célébration lors de dates clefs de l’héritage de la royauté française. Tous les 21 janvier, les sympathisants se réunissent pour une messe en l’honneur du « roi martyr », Louis XVI. Lors de la dernière cérémonie dans l’Eglise Saint-Denis à la Croix-Rousse, une cinquantaine de personnes ont assisté à la lecture du testament du roi et la dégustation de la galette. Parmi eux, quelques figures locales, comme Bruno Gollnisch.

Car derrière cette apparente nostalgie du passé existe une pensée politique réfléchie, d’héritage maurrassien et à vocation nationaliste. Une idéologie qui prône l’ordre, la souveraineté et l’indépendance de la France. Charles Maurras, antidreyfusard notoire, fut un des grands penseurs de l’extrême droite et père du nationalisme intégral, revendiquant des valeurs d’antisémitisme. Parmi ses héritiers, Jean-Marie Le Pen n’est pas en reste.

Une idéologie politique réactionnaire
Avec son passé tumultueux, le Centre Royaliste de l’Action Française souffre aujourd’hui d’une mauvaise image. Un des principaux mouvements d’extrême droite sous la IIIème République, elle fut en 1934 une des ligues à l’origine de la tentative de renversement de la République. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, l’AF adopte majoritairement une position pétainiste : « le choix par Maurras de soutenir le Maréchal Pétain, il l’a fait pour des raisons patriotiques. Notre histoire est de toute façon tellement complexe et riche, on ne peut la réduire à la Seconde Guerre Mondiale », défend sans pour autant dédouaner le mouvement, Stéphane Blanchonnet.

L’Action Française du XXIème siècle a pourtant pris ses distances avec ses prédécesseurs. Aujourd’hui, l’antisémitisme, le pétainisme, font partie d’une vieille histoire. La défense de l’intérêt national est la ligne directrice. Ainsi, « l’immigrationisme, l’ultra libéralisme et le néo capitalisme » sont à proscrire, comme l’affirme leurs affiches. Le Centre Royaliste de l’Action Française rejette néanmoins l’étiquette d’extrême droite, puisque cela implique l’appartenance à un schéma politique républicain. Le projet s’avère en premier lieu institutionnel. « Nous ne prétendons pas que le roi va régler tous les problèmes ! Nous pensons simplement que de meilleures institutions ne peuvent que favoriser la mise en œuvre de véritables réformes que le système actuel a plutôt tendance à rendre impossible », s’exclame le Président du Comité Directeur, M. Blanchonnet.

Néoroyalisme : une troisième voie
C’est surtout un mouvement qui se veut être une alternative à un débat politique considéré comme sclérosé par la maladie républicaine. « Le roi est justement un frein au système des partis qui produit le clientélisme, la démagogie, qui paralyse l’action publique à l’approche des échéances électorales, etc. », explique Stéphane Blanchonnet.

Une position surprenante à une époque où la démocratie, même si de plus en plus contestée, apparaît à tous comme une évidence. Le Président du Comité Directeur garde espoir pour le mouvement encore minoritaire : « nous observons plutôt un développement positif de notre audience. La dernière visite de l’actuel Dauphin de France, le prince Jean, à Lyon, a montré que nous pouvions mobiliser plusieurs centaines de personnes, environ 300 pour la dédicace de son livre. »

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Publié le : samedi 13 août 2011, par Mélanie Rauscher